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06/02/2007

Marketing is dead… Synopsis – 2ème partie

medium_skeleton_back.3.jpgComme promis, voici la seconde partie du synopsis de mon prochain livre… Marketing is dead.

    4 Le pari Pascalien du marketing

L’avenir du marketing semble reposer sur un pari Pascalien : « Si vous gagnez, vous gagnez tout ; si vous perdez, vous ne perdez rien ».

Si nous nous situons dans une logique de progrès, tous les espoirs sont permis, moyennant quelques adaptations : business as usual. Mieux : de beaux jours s’ouvrent aux agences conseils qui pourront – moyennant de grasses rétributions – initier les annonceurs aux nouvelles approches liées aux nouvelles technologies

Inversement, dans le cas d’une logique de rupture, tout est à reprendre à zéro, ou presque ! Allez développer une politique de prix cohérente quand ce sont les consommateurs qui fixent désormais les règles du jeu : je caricature à peine…

Ce qui explique que dans leur grande majorité, les marketers estiment aujourd’hui que si leur discipline doit s’adapter – ce que nul ne saurait nier – malgré tout, cette adaptation se situe plus dans un cadre évolutif que révolutionnaire : les fondamentaux demeurent. 

Pour les citoyens… la question ne se pose même pas : car là, on quitte le champ de la théorie pour celui du vécu, de la quotidienneté.

Un pari sur le futur donc – et bien aisé, parce que rien ne permet de trancher. Ni dans un sens, ni dans l’autre…

« 2006 marque l'avènement du mobile comme média publicitaire », titrait récemment Le journal du net :  « Outre l'envoi de messages commerciaux par SMS, les annonceurs osent désormais utiliser toute la palette d'outils offerts par l'Internet mobile, du MMS à l'affichage de bandeaux sur les sites Wap. Une expérience tentée avec succès par Coca-Cola France à l'occasion du lancement événementiel de sa nouvelle plate-forme de communication mondiale : "Prends la vie côté Coca-Cola" ».

Dans un même temps, 430 000 particuliers tirent des revenus en commerçant sur eBay, 150 000 en vivent à plein temps. Imaginez 150 000 personnes vivent d’un négoce où les acheteurs notent les vendeurs… et vice versa !

Dans un même temps Murdoch, le magnat des médias traditionnels, casse sa tirelire pour se payer My Space : 580 millions de dollars en juillet 2005. Un an plus tard, c’est au tour de Google de débourser 1,65 milliards pour acheter You Tube : plus de deux milliards au total pour deux plateformes où tout un chacun vient déposer ses musiques, ses vidéos, ce que bon lui semble… Du pur Web 2.0.

Les plus riches investissent à tour de bras – et les marketers prient que la locomotive ne déraille pas et que perdurent leurs modèles ! Tant que demeure l’incertitude, tout le monde y trouve peu ou prou son compte.

2.    5 La logique Web 2.0… et au delà

Impossible de trancher ? En prenant un peu de recul, peut-être…

En prenant un peu de recul, force est de reconnaître que Web 2.0 introduit dans la communication des bouleversements nettement plus profonds que ceux généralement envisagés.

Web 2.0, c’est, certes, la montée en puissance du many to many ; mais ce n’est pas que cela.

La communication Web 2.0 diffère de la communication d’hier – Web 1.0, mais également de toute communication humaine jusqu’au début de ce troisième millénaire – par quatre critères essentiels : elle est plurielle, latérale, inverse et asynchrone.

Plurielle : c’est le fameux many to many, nous ne reviendrons pas dessus.

Latérale et non plus up down : aucune hiérarchie a priori entre bloggers,  aucun ne s’arrogeant pas plus de droits que ses lecteurs.

Inverse : vu la multitude des information mises à disposition, l’impulsion principale vient du lecteur qui organise le sens à sa guise, notamment grâce aux flux RSS. 

Asynchrone : hier, vécu comme une contrainte, l’asynchronisme constitue un avantage : il casse l’urgence, et délite des liens trop formels.

Or une telle communication déroge à deux fondamentaux : la notion de systèmes ouverts, élaborée par Gregory Bateson et ses collègues de Palo Alto ; celle ensuite de modèle inférentiel, édictée notamment par Paul Grice.

En ce sens, elle sape les bases de nos sociétés occidentales, les déstabilise : après l’ère des systèmes fermés – dix-neuvième siècle – puis celle des systèmes ouverts – vingtième siècle –, nous entrons dans celle des systèmes instables.

Bien sûr il faut regarder par delà l’épiphénomène Web 2.0, ce que révèle le succès de ce type de communication – l’usure prématurée des valeurs propres aux société occidentales. La fin de la société dite « de consommation ».

« Il est impossible de ne pas communiquer » notait Palo Alto : la communication structure notre univers… et fonde marketing et publicité ; sauf qu’aujourd’hui « les marchés sont des conversations », pour reprendre le premier principe des fondateurs du Manifeste des évidences… ce qui nous situe bien de la communication de marque classique.

3.   6 Plus qu’une révolution… un débordement !

En résumé, ce qui se passe aujourd’hui ne s’inscrit ni dans une logique de progrès – logique évolutive –, ni même dans une logique de rupture – changement de paradigme au sein d’une même structure… puisque c’est la structure même qui se modifie.

Pour saisir l’ampleur du phénomène, précisons que Web 2.0 n’en est pas la cause – juste le catalyseur ! Car si la structure s’effondre si aisément, c’est peut-être qu’elle était déjà bien minée, pour ne pas dire… bien pourrie ?

Et ce qui gêne une claire vision du dit phénomène, c’est qu’il débute bien avant… Web 2.0 ! Un petit détour par le marché de la musique permettra de mieux le cerner.

Le marché de la musique se révèle extrêmement riche d’enseignements : d’une part, la dématérialisation croissante des contenus autorise des mutations inenvisageables dans d’autres secteurs ; d’autre part, la musique participe pleinement de la vie même des jeunes, tout autant que boire ou manger : or ces derniers maîtrisent mieux que tout autres les nouvelles technologies.

La remise en cause de l’économie de marché dans le secteur de la musique apparaît dès la fin des années quatre-vingt dix avec la montée en puissance du mp3, suivie en 2000 par la mise en ligne de Napster par Shawn Fanning… c’est-à-dire la possibilité de s’échanger à l’échelon de la planète de la musique plutôt que l’acheter.

Commence alors un long bras de fer entre jeunes « pirates » et majors, qui verra l’émergence de nouvelles formules d’échanges décentralisées – le fameux P2P –, des procès plus ou moins médiatiques et quelques projets de loi : ça, c’est la logique de l’affrontement – une logique de rupture, qui détient cependant en soi les germes de bouleversements encore plus radicaux et imminents.

L’étape suivante, je la daterai arbitrairement d’octobre 2005 quand quatre musiciens de Sheffield, les Arctic Monkeys, réussissent l’exploit de placer leur premier single en tête des charts en Angleterre, dès sa sortie. Un record que même les Beatles n’avaient pas battu ! A quel producteur, à quel label talentueux doivent-ils un tel succès ?

Aucun… Ils se sont créés seuls leur propre réputation en tournant dans les salles enfumées d’outre Manche : le bouche à oreille – le Buzz – a fait le reste. Le bouche à oreille… et la mise à disposition gratuite de leur musique sur leur site Internet : un adolescent en a parlé sur son blog, puis un autre et bientôt toute la blogosphère… adolescente.

Ils ont simplement nié l’existence même des maisons de disque – eux et d’autres, comme Clap Your Hands Say Yeah aux Etats Unis – et ça a marché : c’est en cela qu’il ne convient plus de parler de révolution mais de débordement.

04/02/2007

CRM et citoyens rebelles

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Le CRM – la gestion de la relation clients en bon anglais – s’engage dans une course endiablée au gigantisme, alliant bases de données de plus en plus sophistiquées et traitement automatique des informations… et de la communication. Résultat : nous voici bombardé de centaines de mails indigestes que nous jetons immédiatement à la corbeille aussi rapidement que les spams pour le Viagra !

Pourtant la gestion de la relation clients ne saurait se réduire à une simple intégration de hardware et de software – aussi ingénieux soient-ils –, à du profiling de data et à l’envoi systématisée de mails pour les entreprises les plus branchées – celles qui s’adressent essentiellement aux individus les plis branchés, évidemment : les internautes.

Car si les spécialistes de l’e-commerce bénéficient de l’incontestable avantage d’une chaîne de vente totalement intégrée et automatisée - présentation des produits, prise de commande, facturation, ordre d’expédition et basculement vers la supply chain –, elles s’adressent également à la cible la plus mouvante et la plus infidèle qui soit : celle des internautes les plus débrouillards.

Les consommateurs les plus à même de zapper de site en site, toujours à l’affut d’une belle affaire – le produit déstocké sur E.bay – et bien sûr les mieux informés – sautant de chats en forums – et les plus exigeants. Les plus avares aussi, traquant le moindre euro d’économie.

Ça, c’était au bon vieux d’Internet : souvenez-vous, fin du millénaire précédent, quand on parlait de Nouvelle Economie ! Vous leur proposiez gentiment le câble USB que le fabricant n’avait pas jugé bon d’inclure dans la boîte de l’imprimante photo… et il allait le dénicher en promotion sur le site de votre concurrent, l’ingrat !

Mais aujourd’hui, avec Web 2.0, les blogs et autres sites citoyens, cela se complique un peu.

Pourquoi ? Après tout, que l’on dise du bien ou du mal de votre marque ou de votre société sur un blog ou au détour d’un forum, cela ne change pas vraiment grand-chose ? Si, si…

Réagir sur un forum constitue un acte contraignant, en raison de sa faible interactivité : on rédige quelques lignes et il faut ensuite revenir le lendemain pour recueillir les réactions ; à moins d’un problème impliquant – je n’arrive pas à installer un driver – ou d’une passion particulière – le cœur des fidèles du forum –, personne ne s’y connecte quotidiennement.

Et puis, il y a forums et forums : sur le forum officiel de Microsoft, nul ne s’attend à une réelle objectivité – le webmaster aura fait la police !

Réagir sur son blog, c’est un peu réagir chez soi : je ne suis pas satisfait d’un produit, je l’écris tout simplement, point barre, et me lira qui voudra. Et me répondra qui voudra : il suffit de cliquer sur : poster un commentaire ; et ça, c’est la magie de l’asynchrone.

L’asynchrone casse l’interactivité : chacun écrit et répond à son rythme ; dès lors, les contraintes liées à la faible interactivité des forums s’efface. Aujourd’hui, nous disposons tous d’un outil d’expression d’une extrême aisance à mettre en œuvre : je trouve navrant le dernier livre de Gilles Lipovetsky ? Je publie une note* sur ce blog… et attends vos réactions.

Evidemment, comment s’y retrouver parmi les potentiels 50 millions de blogs de français de plus de 15 ans – et encore, les jeunes bloggeurs de Skyblog ne les ont pas tous atteints ?

Certains blogs sont plus visités que d’autres : certains bloggeurs bénéficient d’une plus forte autorité. Il se forme au sein de la blogosphère des espèces de nœuds d’autorité : là se concentre l’information, se crée du sens.

Et si là, par malheur, un internaute n’est pas trop content de vos produits, de votre marque, vous pénétrez dans une zone de turbulence : Kryptonite en a fait l’amère expérience, en septembre 2004.

Ce jour-là, Phillip Torrone publie sur Engadget** une note intitulée : Kryptonite Evolution 2000 U- Lock hacked by a Bic pen où il explique comment il est aisé de forcer cet antivol à 50$ avec un simple stylo bille, vidéo à l’appui ! D’autres internautes apportent semblables témoignages et une semaine – et près de 250 000 téléchargements – plus tard, Kryptonite se voit dans l’obligation de proposer l’échange de tous les produits défectueux.

Avec Web 2.0, l’analyse de la satisfaction consommateurs, la gestion de la relation clients nécessitent leur révolution Copernicienne : peu d’entreprises apparaissent à même aujourd’hui de s’adapter à de tels flux d’information inverses. A une communication désormais maîtrisée par le consommateur – et hors de tout contrôle !

* Note du 28 Août 2006.

** http://www.engadget.com

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29/01/2007

Marketing is dead… Synopsis – 1ère partie

medium_skeleton_back.2.jpgComme promis, voici la première partie du synopsis de mon prochain livre… Marketing is dead.

La polémique qui a vu le jour fin 2006 – et qui n’est certainement pas prête de s’éteindre – sur l’éphémérité, pour ne pas dire l’effet de mode, de Web 2.0 dévoile en réalité deux visions radicalement opposée, non pas de ce que devrait être, mais de ce que va être notre société.

L’emploi du futur – en lieu et place du conditionnel – n’est pas innocent : ce ne sont donc pas deux visions politiques ou militantes qui s’opposent – socialiste versus libérale, solidaire versus individualiste, etc. – mais deux assomptions sur l’évolution probable de notre civilisation.

La question n’est pas : Comment agir sur le monde ? mais : Comment adapter son action d’aujourd’hui selon  ce que sera le monde de demain ? Et dans le cas présent, déterminer si l’on s’inscrit dans logique de progrès ou de rupture…

1.   1 Une logique de progrès versus une logique de rupture

La logique de progrès pourrait s’écrire Web 1.0, Web 2.0, Web 3.0, and so on. Dans une telle logique technologique, le Web collaboratif succède légitimement au Web initial parce qu’intégrant des technologies nouvelles : Ajax, CSS 2.0, syndication Atom ou RSS, etc. Quand le Web descendra dans nos téléphones mobiles débutera l’ère de Web 3.0…

Web 1.0 a vu naître le marketing interactif – avec le click through comme leitmotiv ; Web 2.0, le buzz marketing ; avec Web 3.0, se développeront d’autres formes de ciblage dynamique : marketing et communication tireront toujours le meilleur profit des évolutions technologiques.

La logique de rupture s’intitulerait alors Web 2.0 for ever ! Dans une logique sociétale, le Web collaboratif marque la fin d’une époque, celle du one to many et de la domination le l’émetteur – organe de presse, marque, etc. Peu importe les technologies – reléguées ici au second plan – seule compte la capacité des citoyens à s’exprimer dans un modèle de type many to many. 

Dans une telle dynamique, marketing et communication ne sortiront certainement pas indemnes : non seulement n’importe quel commentaire posté par un consommateur au détour d’un forum ou d’un blog pèse plus que la meilleure campagne de publicité, mais les marques convaincues de « tricherie » – faux blogs, pseudo experts, etc. – sont immédiatement soumises à la vindicte publique.

Logique de progrès et logique de rupture s’inscrivent tout aussi légitimement l’une que l’autre dans  le cadre de l’article fondateur de Tim O'Reilly : What Is Web 2.0.[1] En fait, le fondateur de O'Reilly Media se contente d’opposer ce qui selon lui relève de Web 1.0 – Britannica Online, les sites personnels, etc. – de ce qui préfigure Web 2.0 : Wikipedia, le blogging, etc. Ce qui laisse la porte ouverte à toutes les exégètes !

Seconde remarque, l’opposition logique de progrès versus logique de rupture transcende totalement la simple problématique actuelle du Web 2.0 : car ce que remet en cause la seconde analyse, c’est la vision d’une civilisation en perpétuel progrès – ou plutôt d’un perpétuel progrès comme fondement de notre civilisation. Et en ce sens, elle rejoint – sans les recouvrir, il est vrai – les théories récentes sur une nécessaire décroissance.

2.   2 Logique de progrès

La logique de progrès enfonce ses racines au seuil de l’ère industrielle – car le progrès qui nous concerne ici est bien le progrès technologique. Si la naissance de l’imprimerie a favorisé le développement d’une communication one to many, c’est au dix-neuvième siècle qu’est née une réelle communication de masse avec Émile de Girardin et le développement de la presse populaire.

La logique de progrès, c’est la naissance de la société de consommation – avec ses deux faces : côté sociétal d’une part, avec des citoyens qui accèdent de plus en plus nombreux à une qualité de vie qui leur était totalement étrangère auparavant ; côté commercial de l’autre, avec le développement du marketing et de la communication publicitaire.

Progrès social quand automobile et téléphone abolissent les distances ; quand le lave-linge remplace la lessiveuse, et le réfrigérateur les garde-manger. Un progrès qui ne s’est jamais ralenti, bien au contraire, avec l’arrivée de l’ordinateur et de la téléphonie mobile : jamais produit n’aura pénétré si rapidement son marché.

Et jamais produit n’aura connu pareilles évolutions : un téléphone mobile, c’est tout à la fois, un baladeur mp3, un appareil photo, et avec l’arrivée des nouveaux smart phones, un véritable ordinateur de poche.

« Ensemble des techniques et études d'applications qui ont pour but de prévoir, constater, susciter, renouveler ou stimuler les besoins des consommateurs et adapter de manière continue l'appareil productif et commercial aux besoins ainsi déterminés » selon Kotler, le marketing accompagne étroitement le développement de la société de consommation.

Inscrit au cœur de cette logique de progrès, le marketing saura nécessairement – et doublement – s’adapter aux évolutions technologiques : pour assurer le développement et la promotion des nouveaux produits high tech ; mais également pour utiliser efficacement la complète palette des nouveaux outils communicants à sa disposition.

Bientôt, votre téléphone vous bipera pour vous annoncer la sortie d’un nouveau yaourt au chocolat, voire vous offrir une réduction, quand vous passerez devant le rayon frais de votre hypermarché… et pas celui de votre voisin qui n’achète jamais de desserts lactés de cette marque-là !

Dans cette logique, les petites alertes de ces dernières années – mouvements anti-pub, alterconsommation, échec du Wap, etc. – ne sont que secousses sans lendemain : le consommateur s’appropriant logiquement les outils communicants à sa disposition, devient plus avertis… d’où l’échec de produits et services mal marquetés comme le Wap, d’ailleurs.

Le marketing devra s’adapter à une société en mouvements… comme il a toujours su le faire par le passé. Récemment, Le journal du net dévoilait ses : Cinq clés pour réussir sa campagne de marketing mobile… D’autres, comme Gilbert Reveillon rajoutent une « nouvelle couche de complexité » en militant activement pour un Nano Marketing – un marketing tellement ciblé que presque individualisé.

3.  3 Logique de rupture

Dans une logique de rupture, les petites alertes précédentes ne sont que les signaux précurseurs de lames de fond beaucoup plus graves et violentes.

En fait, gavés de produits souvent totalement dépourvus de sens, les citoyens freinent des deux pieds et ne se laissent plus séduire par les sirènes du progrès technologique ; ils ne se ruent plus sur les dernières innovations high tech, mais attendent patiemment quelques premiers bugs soient corrigés et les prix aient chutés, souvent drastiquement.

En ce sens, l’échec du Wap se relira comme le refus de consommateurs qui, à peine équipés de téléphones mobiles GSM, refusent de s’embarquer dans d’hypothétiques aventures sous prétexte que quelques mois plus tard doit arriver la 3G : pas un service mal marqueté donc – simplement un service de trop. Même remarque concernant le magnétoscope Digital VHS qui n’a tenu que quelques mois en rayons.

Les consommateurs peuvent se contenter de surfer astucieusement, mais passivement, sur une offre pléthorique qui les dépasse : j’achète un téléphone appareil photos baladeur mp3 simplement… parce que, subventionné par les opérateurs, il ne me revient pas plus cher qu’un basique, mais je me garde bien d’envoyer quelque MMS que ce soit !

Plus actifs, ils peuvent avant tout achat se documenter extrêmement précisément sur Internet – en termes de choix, caractéristiques et bien sûr de prix – avant de rendre visite à leur magasin préféré ; et là, obtenir le produit de leur choix au prix de leur choix, face à un vendeur qui ne peut mais ! Aujourd’hui, il n’est plus un distributeur qui ne s’aligne…

Et c’est là que Web 2.0 va tout précipiter. Avant, les consommateurs pouvaient dialoguer entre eux sur des forums soumis au bon vouloir des marques ; maintenant, ils peuvent dialoguer entre eux chez eux. Sur leur blogs, par exemple : Kryptonite, le fabricant d’antivols américain en a fait l’amer expérience le jour où un internaute a mis en ligne une vidéo expliquant comment forcer son produit phare… avec un capuchon de stylo.

Le marketing – le marketing qui s’enseigne en business schools et se dévore dans ces bibles qui s’appellent Kotler ou Mercator – a bien des soucis à se faire : non seulement les consommateurs disposent des mêmes connaissances que les marketers, mais ils disposent d’outils performants et inédits leur permettant de reprendre la main.

Et là, les marketers perdent soudain pied : Vichy lance Le journal de ma peau, le blog d’une jeune fille qui aime peu trop les produits de la marque... et doit le fermer précipitamment, avec des excuses. Plus récemment, aux Etats Unis, c’est Sony et Wal-Mart qui viennent de se faire prendre la main dans le sac de la tromperie grossière.

Dans tous les cas, la supercherie fait long feu : les marketers – le marketing – n’est pas adapté à une société où ce sont les consommateurs qui donnent le la. Qui prennent l’initiative, fixent les règles : un nouveau marketing à inventer ? Mais pourra-t-on encore parler de marketing ?

D’ailleurs il suffit de taper « Marketing is dead » sur Google pour prendre conscience du malaise qui frappe la profession : des dizaines et des dizaines de papiers, certains misant sur l’effet provocateur du propos, d’autres plus pessimistes ; ainsi un dénommé Dale Wolf titre-t-il sur son blog : « Mass marketing is dead but no one seems to have noticed », évoquant un autre expert américain, Melinda Nykamp, qui écrivait dès 2001 :

« Mass advertising does not continue to survive due to its consumer appeal and relevance ; it survives because it is difficult to measure on a return-on-investment basis. It is this very lack of measurement that enables mass advertising to continue – often unchallenged – as a viable communications approach ».

Bref le marketing ne survit que parce que… nul ne sait en mesurer les réels effets !

25/01/2007

Don’t disturb, j’ai un site web

medium_erreur.jpgJean-Félix Biosse Duplan, un copain des Mardis du Luxembourg et Directeur Marketing de BBGR (Groupe Essilor), voulait poster un petit commentaire en réaction à ma note Air France, Visa Premier, Pixmania et Kiala ne répondent plus !*; je trouvé que son papier trouve pleinement sa place au sein de la rubrique Les copains d’abord.

Comme je viens de finir Les Bienveillantes, j’ai voulu retrouver les critiques écrites fin août, alors que je n’avais pas le livre entre les mains et qu’il n’était d’ailleurs pas encore en vente !

Google m’indique (en 0 seconde 03) 710 000 pages. Je n’ai plus qu’à chercher l’aiguille dans la meule !

Un ami a crée les sons du dernier jeu vidéo Red Steel compatible avec la fameuse console Wii. Je m’amuse a googeliser le nom du jeu, pour voir. Il faut 11 centièmes de seconde à notre génie pour m’annoncer que 51 800 000 pages sont disponibles !

Le jeu est en vente depuis 2 semaines…

Ces exemples démontrent comment les comportements changent avec Internet et moins comment Internet change les choses. Un gros livre de 900 pages en provoque 700 000 fois plus ! Un jeu vidéo entraîne un déluge de messages, d’humeurs, de jugements, de remarques. En fait un jeu dans le jeu, car les chatteurs n’ont de cesse de repérer des images cachées, des symboles, des interprétations et les partager.

Internet est bien la base d’un échange multiple, immédiat et quasi infini.

Au même moment, il est frappant de constater que le comportement de certaines entreprises ne change pas. Elles ont un site web, bien entendu, comme leurs concurrents. Mais elles ne l’utilisent pas pour ce qu’il est. Attention ! Ce n’est pas un problème de compétence (je ne sais pas comment ça marche) mais un problème de refus (je ne veux pas utiliser l’outil).

Voyons un cas précis :

A part les habituelles cases blanches rectangulaires dédiées aux numéros de carte bancaire et de téléphone (pour vous déranger le vendredi à 20 heures), rien. Il n’y a pas de rubrique contact, pas de possibles échanges de mails, ni de forum bien sûr ! Normal direz vous pour des entreprises brick&mortar qui débutent dans l’interactif et l’Internet !

Sans doute, mais moi je vous parle de boîtes qui baignent dans le technologique, le virtuel et le mobile. Canal + par exemple.

Le site est particulièrement peu « convivial » (mot informatique pour dire agréable).On parle ici de contenu, pas de mise en page. Même les programmes ne sont pas mis en valeur ! La rubrique TV de 20 Minutes fera mieux l’affaire. Et si vous voulez « laisser » une évaluation ou une question sur une émission, retrouver une archive, demander une précision, donner votre opinion, ce n’est pas possible. Que vous soyez abonné ou simple passant, Canal + n’a pas besoin de connaître votre avis.

Ce n’est pas le retard pour intégrer un nouveau média, ni l’absence de vision qui sont problématiques. Ce que je dénonce c’est une forme d’hypocrisie. La volonté de se protéger de ses clients, de les tenir à distance. Non pas que leur avis ne les intéresse pas : ces entreprises ont de confortables budgets d’études et les focus group fleurissent régulièrement. Mais accepter le dialogue, dans sa dimension directe, spontanée, permanente, non structuré et imprévisible, c’est non !

C’est un marketing très  particulier qui n’accepte pas les changements, et qui à force de se boucher les oreilles, devient aveugle. Il  fait grand tort à notre métier.

C’est aussi l’absence de moyens, c'est-à-dire de stratégie, car pour gérer un site interactif, il faut du monde et cela coûte cher, même délocalisé à Bangalore !

Faut il penser qu’on a glissé dans le Plan Media une ligne Internet, entre Cul de bus et Napperon de restaurant d’autoroute, à la satisfaction générale ?

Finalement Internet ne change rien et c’est toujours la bonne vieille et même logique producteur è acheteur, sens unique.

La même logique que le code 6YHN 89J4 sous la boîte de conserve !

L’emballeur # 567 89Z 43 !

Le « made in PRC » (Avez-vous visité ce pays ?)

La presse écrite a son médiateur, la télévision vit du micro trottoir, la radio fat intervenir le public sans arrêt, même l’affiche devient interactive ! Mais Voyages SNCF, premier site marchand français, Ikea, Bouygues Telecom, Norton Symantec sont eux aussi en sens unique. Je suis certain que vous allez en trouver d’autres.

En tant que consommateur je suis  légitimement agacé,  mais  en termes marketing  que conclure ?

Cette conduite est dangereuse pour plusieurs raisons :

  • Les internautes consommateurs ont vite repéré l’entreprise qui refuse le dialogue par rapport à ses concurrentes,
  • Elle favorise d’autres endroits pour parler de l’entreprise, hors de son contrôle et donc potentiellement plus libres et ingérables. Le faux y rencontre parfois le vrai,
  • Elle montre à ses clients que leurs avis ne l’intéresse pas,
  • Elle confirme les opposants à l'économie de marché dans leurs opinions les plus archaïques,
  • Elle démontre que l’irruption d’un outil fabuleux ne change rien dans les vieilles pratiques. Le GPS ne m’empêche pas de griller les feux rouges !
  • Elle devrait nous inciter à la prudence, nous qui constatons le nouveau pouvoir du consommateur ! Nous ne faisons qu’ajouter à leurs craintes !

L’avenir c’est le Web 2.0 ?  Sans doute, mais vous l’aurez voulu !

PS de Marketingisdead : Je compléterai la liste précédente en ajoutant que cette conduite est également dangereuse parce qu’elle conduit à des réactions négatives du style « Tous pourris » : j’ai supprimé à la suite de mon papier du 10/12/06 un commentaire visant nommément José Manuel Barroso, président de la commission de Bruxelles, suite à… un retard de courrier ; ce qui me gênait le plus, c’était le lien vers un blog politique de soutien à Philippe De Villiers !

* Note du 10 Décembre 2006
 

17/01/2007

Marketing is dead… le livre !

medium_skeleton_back.jpgDepuis le temps, il fallait bien que ça arrive !

Ça, c’est Marketing is dead… le livre ! Je dois reconnaître que le précédent* a vieilli : pensez, un livre qui date… d’avant Web 2.0 !

Il était temps… que je m’y mette : car si le titre est – provisoirement – trouvé, reste le livre… à écrire ! Et c’est là que commence l’aventure… pour vous.

Oui, vous avez bien lu : pour vous !

Marketing is dead – le livre, donc – est né d’un synopsis rédigé dans le cadre des Mardis du Luxembourg**, le Think Tank que nous avons lancé à quelques copains il y a quelques moins dans le but de réformer le marketing.

Ou d’imaginer un autre marketing.

Voire d’inventer une société… sans marketing : allez savoir, les idées les plus folles peuvent alors circuler !

Dans ce genre de cénacle, chacun vient avec ses idées, les jette sur la table, et tous se ruent dessus, les dissèquent, les désarticulent ; et en fin de soirée, de nouvelles idées ont germé, que chacun part retravailler de son côté.

Une dizaine de pages intitulées Marketing is dead, voilà ma contribution des derniers mois.

Ma vision que le marketing – tel qu’il s’enseigne et se pratique encore aujourd’hui – est mort et bien mort : ce n’est pas parce que l’on applique à la lettre des recettes éculées que le résultat est probant !

Il est temps de construire autre chose – qu’on l’appelle ou non marketing, peu importe : il est temps d’apprendre à raisonner autrement.

Heureusement, certains ont commencé : c’est en discutant avec eux que je peaufine ce projet de livre.

Ainsi commence donc l’aventure… pour vous.

Une nouvelle catégorie est née sur ce blog : MarketingIsDead : dans les semaines, vous y retrouverez le synopsis du livre – en trois publications successives – puis au fur et à mesure de l’écriture du livre, je vous consulterai, vous soumettrai des morceaux de chapitres, vous interrogerai.

Connaissez-vous d’autres initiatives novatrices semblables au Pinko Marketing ?

Le marketing de la demande ne devait-il pas nécessairement mener le marketing dans le mur ?

Que pensez-vous de l’innovation ascendante ?

Préparez-vous à une multitude d’interrogations : moi, j’attends critiques et suggestions.

Avec vous, j’aimerais construire quelque chose de nouveau : je ne sais pas vers où je m’embarque - je ne sais pas vers où je vous embarque non plus, mais… c’est parti !

* Je parle de La Grande Mutation des Marques High Tech.

* Voir note du 16.07.2006.