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07/12/2007

Danse avec les renards

3aa8ae1cf84b1dbae96908c03a8797d6.jpgMarie-Claude Sicard vient de publier : Danse avec les renards : Comment nos petites singeries soutiennent le pouvoir marchand aux Editions du Palio.

Elle accepte ici de répondre à mes questions.

MarketingIsDead : Web 2 change-t-il le rapport de force entre marques et consommateurs, au profit de ces derniers ?

Marie-Claude Sicard : L’exemple de Dell est intéressant, car il montre que le Web 2.O accélère les rapports de force plutôt qu’il ne les change en profondeur. Que les consommateurs se rebiffent et l’emportent à l’occasion contre les marques, ce n’est pas nouveau.

Ce qui est nouveau, c’est la gratuité et la vitesse de propagation de l’information. Dans les années 60, il a fallu à Ralph Nader de gros moyens financiers et des années de procédures contre l’industrie automobile américaine, en particulier Chevrolet, pour obtenir gain de cause. Aujourd’hui, la même campagne atteindrait son but en quelques semaines.

Mais inversement, le même outil peut jouer en faveur d’une marque : la notoriété des cosmétiques Botoina vient de se construire par blogs interposés (à l’initiative des seuls internautes) bien avant qu’on ne commence à les voir apparaître dans les vitrines des pharmacies. La nouveauté de l’outil ne prédit pas l’usage qui en sera fait, et même si celui-ci devait devenir un instrument d’attaque aux mains des seuls consommateurs face à des marques réduites à l’impuissance, il s’ensuivrait un déséquilibre des forces en présence qui le décrédibiliserait.

Par ailleurs, je note que c’est l’entreprise Dell qui a souffert de la diffusion des informations en question. L’entreprise, et non la marque. Depuis une dizaine d’années, on tend à les confondre, mais l’entreprise n’est pas la marque. La première peut subir de sérieux revers, la seconde amortit les chocs. L’une peut disparaître, l’autre lui survit souvent.

MarketingIsDead : La raison de la crise qui secoue la profession a-t-elle pour origine le refus du marketing de se connaître soi-même, et partant, de se remettre en cause ?

Marie-Claude Sicard : Certainement, car c’est un refus doublé d’un fantasme. Le marketing refuse d’être ce qu’il est, une technique, tout en rêvant d’être ce qu’il n’est pas, à savoir une science. Ries et Trout peuvent bien soutenir le contraire, il n’y a pas de lois en marketing, seulement des techniques plus ou moins éprouvées, dont aucune n’est jamais une garantie de succès.

Mais contrairement à d’autres professions, le marketing, quand il est attaqué, ne peut pas s’abriter derrière l’argument technique pour se justifier, parce que son champ d’application n’est pas neutre : c’est l’esprit humain. Les premiers spécialistes de cette nouvelle discipline s’appelaient d’ailleurs "attention engineers", des ingénieurs de l’attention, et partant, de toutes les autres facultés cognitives, comme la mémoire ou la perception. De là à devenir les ingénieurs du comportement, il n’y avait qu’un pas, franchi très tôt par la collaboration avec les behavioristes, comme ce fut le cas de Watson chez J. Walter Thompson aux USA, dans les années 1910.

Un siècle plus tard, cependant, l’enthousiasme scientiste a du plomb dans l’aile, et tout ce qui touche de près ou de loin à la manipulation des esprits, surtout à des fins mercantiles, provoque l’indignation. Qu’il y ait beaucoup d’hypocrisie dans cette indignation, cela ne fait aucun doute, mais voilà, nous sommes entrés dans l’ère du soupçon, et pour longtemps.

Le marketing, du coup, se trouve coincé, faute de pouvoir assumer ni son ascendance (historiquement, sa filiation avec la propagande est prouvée), ni son réel et dangereux pouvoir d’influence, faute aussi de pouvoir prétendre à une quelconque scientificité. La seule façon de sortir de ce piège m’a paru être un déplacement du projecteur vers le partenaire obligé du marketing : le consommateur, prompt à se glisser dans le rôle de pauvre victime, pourtant incompatible avec celui d’individu libre, autonome et souverain qu’il revendique aussi par ailleurs.

Une telle contradiction cache un vilain mensonge, celui que La Boétie appelait la "servitude volontaire", mais évidemment, il est plus facile à démonter depuis une position d’indépendance, comme la mienne, que lorsqu’on est directeur du marketing ou de la communication d’une grande marque. Je l’ai été, je parle donc en connaissance de cause.

 

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29/11/2007

DéSencyclopédie

a03cc985c0cfe66210da1f80b4c52de7.jpgReçu il y a déjà quelques jours ce mail de Jérôme sur l'anti-Wikipédia.

"Ou plutôt la DéSencyclopédie … mort de rire, la parodie du web2.0 est enfin en marche. Je trouve cela très utile, la caricature, très sain. Vraiment c'est ce qu'il manquait pour finaliser le web2.

Tiens, par exemple, la page "Levallois-Perret" :

http://desencyclopedie.wikia.com/wiki/Levallois-Perret

"Levallois-Perret ne possède plus d'ambassade en Somalie. Les petits somaliens avaient tellement faim qu'ils l'ont mangée".

Comme on dit chez Michelin : vaut le détour !

 

21:34 Publié dans Web 2.0 | Lien permanent | Commentaires (1) |  Facebook | | Pin it!

Pour quelques chocolats de plus …

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De Bruges, je garde le souvenir nostalgique de 5 à 6 jazzmen habillées en Pères Noël • à moins que ce ne soit l’inverse • face à un parterre d’enfants subjugués et étonnés de pouvoir en toucher autant à la fois.

Alors, que la ville de Bruges décide d’accueillir 3 bloggers pour faire savoir que la métropole flamande constitue une destination agréable mais méconnue en cette période hivernale, m’étonne : pour moi Bruges, c’est la ville où l’on va acheter ses chocolats de Noël en déambulant de Grand Place en Béguinage • si vous ne connaissez pas le Béguinage, vous ne méritez même pas d’y aller.

Ce qui serait dommage, puisque justement on vous offre en ce moment la troisième nuit gratuite ! C’est amusant, pour moi cette semaine est vraiment placée sous le signe de la Belgique. Déjà ce matin, Libération vient de publier un numéro spécial : Allez les Belges !

Et puis, grâce à mon ami l’indiscipliné Thierry, j’ai fait connaissance d’Axel Gryspeerdt, professeur à l’Université de Louvain : dans le train qui nous menais à un même colloque, nous avons longuement échangé, et je peux vous dire que bien des chercheurs français en communication auraient à prendre exemple sur leurs confrères belges, plutôt que de puiser toujours aux sources anglo-saxonnes. D'ailleurs, je compte bien l'inviter ici même dans les prochains jour, juste pour vous prouver que les histoires Belges peuvent aussi être sérieuses ...

Bref, tout cela pour dire que la blogosphère belge ne va pas tarder à nous envahir : mais d’ici qu’ils réussissent à avoir plus de 10 millions de blogs d’adolescents comme nous en France, il y a encore de l’eau qui coulera sous les ponts … de Bruges, par exemple.

Quoiqu’à lire certains Skyblogs, je ne suis pas sûr qu’ils ne soient pas en flamand, tellement c’est compliqué à déchiffrer !

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26/11/2007

Chronique d’Afrique du Sud

3a136faf8f1f22b5388594c38b44f158.jpgPost écrit depuis Le Cap où je participe à l'assemblée générale de l'European Marketing Confederationdont l'Afrique du Sud est membre, tout comme la Turquie, d’ailleurs.

Très belle présentation de nos collègues Sud Africains sur un marketing nécessairement ingénieux et inventif, dans un pays où plus de 80% de la population vit dans des conditions particulièrement précaires – dans des townships pour une bonne part d'entre elle.

C'est à dire dans des bidonvilles mal alimentés en eau et pas toujours reliés aux réseaux électriques et téléphoniques : résultat, la pénétration du téléphone fixe y dépasse à peine les 10%. J’avais visité Soweto lors d’un précédent voyage, il y a une dizaine d’années : les photos que j’ai vues ces jours-ci, souligne combien la misère y est difficile à éradiquer.

Par contre, le mobile est presque aussi répandu ici qu'en Europe, plus de 9 Sud Africains sur 10 en étant équipé, tous renouvelant très régulièrement leurs terminaux pour disposer des dernières nouveautés – prêts pour certains à investir l’équivalent d’un salaire mensuel pour coller aux dernières technologies !

Du coup, le marketing mobile connaît ici des développements nettement plus rapides que chez nous : les consommateurs acceptent d'autant plus volontiers de recevoir des SMS ou MMS publicitaires que ce type de messages leur donne l'impression de pénétrer de plein pied dans une société de consommation dont ils rêvent … mais si loin finalement de leur quotidien !

Conséquence immédiate de cette sur exposition à une consommation pas toujours accessible - surtout ici où le chômage touche entre un tiers et un quart de la population, selon les modes de calcul : la criminalité ne recule guère et Le Cap, encore relativement préservée il y a une quinzaine d'année, ne doit son apparente tranquillité qu'à l'omniprésence de la police et la sécurisation d'immense centres commerciaux.

Et pourtant jeudi dernier encore, un homme y est mort poignardé en plein centre ville alors qu'il retirait de l'argent à un distribanque ! Pour quelques centaines de Rands au plus – quelques dizaines d’Euros !

Pour en revenir au marketing mobile, l'Afrique du Sud apparaît nettement plus en pointe que nous – plus proche du Japon que de l'Europe … bien évidemment pour des raisons diamétralement opposées : les Asiatiques vivent dehors par tradition1 ; et les Sud Africains, par pauvreté, comme les indiens dans les mégalopoles du sous-continent.

Dans les deux cas, ils acceptent volontiers les formes les plus intrusives de communication mobile : au Japon, ils en raffolent même et le marché se développe particulièrement vite ; évidemment, en Afrique du Sud, la machine présente quelques hoquets, les réseaux s’engorgeant vite.

Chez nous de telles pratiques irritent, dérangent, à en croire les premières expériences et réactions.

Sommes-nous "en retard" pour autant ? Je ne pense pas : nos pratiques culturels se situent à cent lieux des leurs – et nous ne sommes ni nomades par tradition, ni par nécessité : nous le sommes qu'occasionnellement, par choix, souvent par plaisir - sortie au cinéma, restaurant, shopping - et préférons préserver ces instants de toute agression publicitaire.

1 Voir ma note du 04.05.2006 : Worldwide Consumer Insight.

 

21/11/2007

Premières lignes

93b68dd17fb5b27b81e7dd0ea3e330cd.jpgIl y a deux ans, je lançais mon blog au titre explicite : Marketing Is Dead.

D’aucuns y ont vu un pamphlet, ou un vulgaire "crachat dans la soupe", là où il ne fallait entrevoir que le plaidoyer pour un autre marketing, loin de la pensée unique qui hante la profession, et ultra codifiée au sein d’ouvra­ges stéréotypés qui répètent à l’infini les mêmes antiennes.

Le marketing court à sa perte, s’il ne se réforme pas !

Ce livre prolonge la réflexion et explore quelques pistes refondatrices : le marketing n’est ni une science exacte, ni éternel ; et il le ne survivra que s’il retrouve la dimension humaine qui lui fait, hélas, si défaut aujourd’hui.

Un autre marketing … Marketing 2.0 !

Le terme est ambigu, parce que recouvrant au moins deux réalités … ce qui permet aux exégètes du Marketing 2.0 de disserter à l’infini et de se contredire à l’envi, sous l’œil indifférent de ceux qui ne voient là qu’un effet de mode.

Un effet de mode, comme le Web 2.0, dont on nous annonce sans cesse la mort prochaine.

Le Marketing 2.0 pourrait en effet n’être qu’un marketing basé sur ce Web 2.0 : marketing du World of Mouth ou Buzz Marketing – marketing du bouche à oreille et de la rumeur – par exemple, Marketing communautaire, etc. Un marketing intangible et éternel, s’appropriant de nouvelles techniques …

Mais le Marketing 2.0 pourrait – devrait – être bien plus que cela : le marketing d’une nouvelle civilisation, qui se construit non seulement grâce aux outils du Web 2.0 – blogs, wikis, réseaux sociaux, etc. – mais également en réaction, contre la société, la civilisation actuelle.

Et les inconscients qui n’y voient qu’un effet de mode seront surpris quand leurs empires d’hier trembleront … S’effondreront !

Si je devais qualifier d’un terme le Marketing 2.0, j’emploierais celui d’hu­main … un adjectif plutôt rare en marketing – mais c’est peut-être aussi pour cela que le marketing court à sa perte : codifié dans le marbre de traités universitaires, il a perdu toute humanité.

Il a divergé d’une civilisation qui se transforme aujourd’hui sans lui.

Voilà, vous venez de découvrir les premières – et provisoires – lignes de mon prochain livre : je dois rendre le manuscrit d’ici deux gros mois.