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21/11/2007

Premières lignes

93b68dd17fb5b27b81e7dd0ea3e330cd.jpgIl y a deux ans, je lançais mon blog au titre explicite : Marketing Is Dead.

D’aucuns y ont vu un pamphlet, ou un vulgaire "crachat dans la soupe", là où il ne fallait entrevoir que le plaidoyer pour un autre marketing, loin de la pensée unique qui hante la profession, et ultra codifiée au sein d’ouvra­ges stéréotypés qui répètent à l’infini les mêmes antiennes.

Le marketing court à sa perte, s’il ne se réforme pas !

Ce livre prolonge la réflexion et explore quelques pistes refondatrices : le marketing n’est ni une science exacte, ni éternel ; et il le ne survivra que s’il retrouve la dimension humaine qui lui fait, hélas, si défaut aujourd’hui.

Un autre marketing … Marketing 2.0 !

Le terme est ambigu, parce que recouvrant au moins deux réalités … ce qui permet aux exégètes du Marketing 2.0 de disserter à l’infini et de se contredire à l’envi, sous l’œil indifférent de ceux qui ne voient là qu’un effet de mode.

Un effet de mode, comme le Web 2.0, dont on nous annonce sans cesse la mort prochaine.

Le Marketing 2.0 pourrait en effet n’être qu’un marketing basé sur ce Web 2.0 : marketing du World of Mouth ou Buzz Marketing – marketing du bouche à oreille et de la rumeur – par exemple, Marketing communautaire, etc. Un marketing intangible et éternel, s’appropriant de nouvelles techniques …

Mais le Marketing 2.0 pourrait – devrait – être bien plus que cela : le marketing d’une nouvelle civilisation, qui se construit non seulement grâce aux outils du Web 2.0 – blogs, wikis, réseaux sociaux, etc. – mais également en réaction, contre la société, la civilisation actuelle.

Et les inconscients qui n’y voient qu’un effet de mode seront surpris quand leurs empires d’hier trembleront … S’effondreront !

Si je devais qualifier d’un terme le Marketing 2.0, j’emploierais celui d’hu­main … un adjectif plutôt rare en marketing – mais c’est peut-être aussi pour cela que le marketing court à sa perte : codifié dans le marbre de traités universitaires, il a perdu toute humanité.

Il a divergé d’une civilisation qui se transforme aujourd’hui sans lui.

Voilà, vous venez de découvrir les premières – et provisoires – lignes de mon prochain livre : je dois rendre le manuscrit d’ici deux gros mois.

03/10/2007

Flemme ?

16bf93f882c639cc78c71af53a0e51cc.jpgPeut-être aurez vous constaté ces dernières semaines une certaine baisse de productivité sur ce blog : Monsieur MarketingIsDead aurait-il la flemme après les vacances ?

Pas vraiment, je n’ai jamais autant écrit que ces derniers jours… même si je n’ai pas tout publié dans ces colonnes.

Et Marketing Is Dead, le livre, serait-il également en panne ?

Non, il avance plutôt bien – l’un expliquant l’autre, d’ailleurs.

En effet, après de longues interrogations, j’ai décidé de faire confiance à Malo Girod de l'Ain et à le publier chez M21 Editions ; et de fait, maintenant, j’ai des dead lines à respecter – un manuscrit à rendre.

Je n’ai pas pour autant abandonné mes réflexions sur une maison sur l’opportunité de lancer – provoquer, coopérer à, etc. – une maison d’édition de type 2.0, bien au contraire.

Pour l’heure les initiatives de Malo me semblent aller dans le bon sens – celui de l’histoire et du 2.0 – avec ses espaces collectifs collaboratifs et ses blogs liés aux livres publiés chez M21 : pour lui, le livre ne s’arrête pas à du papier déposé sur les rayons des libraires, il doit continuer à vivre, évoluer, provoquer le dialogue au delà…

Par ailleurs, Malo se prépare également à la grande révolution de l’encre électronique… et là encore, bien des surprises sont à venir. L’avenir du livre – le Livre 2.0 ? – se situera à la croisée de ces chemins : voilà pourquoi j’ai choisi de progresser un peu avec lui.

Dans les jours qui viennent, je vous solliciterai au travers d’un florilèges de questions… certaines de vos réponses se retrouveront dans le livre.

 

14/02/2007

Marketing is dead… Synopsis – 3ème partie

medium_skeleton_back.4.jpgComme promis, voici la dernière partie du synopsis de mon prochain livre… Marketing is dead.

      7 Le marketing d’après… le marketing !

Le marketing est-il appelé à disparaître – en tant que fonction au sein des entreprises ? Certainement non, il sera toujours nécessaire « d’adapter de manière continue l'appareil productif et commercial aux besoins » du marché.

Aux besoins du marché. Et non à des besoins de consommateurs suscités, ou stimulés : Ce qui est mort, c’est le marketing de la demande – ce marketing où l’industriel se substitue à ces clients pour définir leurs propres besoins ! Le marketing tel qu’il se pratique massivement aujourd’hui avec toutes ses dérives dénoncées par Naomi Klein, les casseurs de pub ou les tenants de l’alter consommation .

29 Mars 2006, je postais un premier billet sur mon tout nouveau blog : Marketingisdead.

Le marketing de la demande est simplement mort parce qu’aujourd’hui les consommateurs ne demandent plus rien… ou se révèlent totalement incapables de formuler quelque besoin qui soit : ils prennent, exigent, détournent éventuellement, contestent souvent – point barre ! Leur principale et plus violente critique : c’est un « produit marketing »

Ceci bien établi, s’envisage non plus un marketing unifié, mais trois pôles complémentaires, selon que les deux acteurs du marché – producteur et consommateur – agissent séparément ou de concert ; ce qui conduit à un triptyque : marketing de l’offre, marketing citoyen, marketing collaboratif.

Le Marketing de l’offre doit impérativement se ressourcer pour éviter – faire oublier – les dérives de ces vingt dernières années : honnêteté, sincérité, fiabilité des produits et engagement citoyen.

Marketing de l’offre ne signifie évidemment produire à l’aveugle ; bien au contraire, cela signifie se situer en totale phase avec son époque : études de tendances, réseaux de Consumer Insight, repérage de signaux faibles sur le Web, etc. constituent autant de guides utiles.

Exemple de marketing de l’offre : Archos et les baladeurs mp3 et Mpeg4, LG et toute sa gamme d’électroménager brun et blanc, la presse magazine à fort contenu éditorial, le label musical Secteur A, etc.

On évoquera également ici Zara qui dépense moins de 0,3% de son chiffre d'affaires en marketing contre 3,5% en moyenne chez H&M et parle de no marketing.

Marketing citoyen – ou plus précisément des citoyens : ici, pas de marketing à proprement parler puisque ce sont les citoyens qui créent les produits et services concernés… sauf que ces systèmes informels de production – ces systèmes instables – demandent pour exister des plateformes stables.

Exemple de plateformes stables : toutes les plateformes de blogs, YouTube, MySpace, Dailymotion, etc. Sans oublier évidemment eBay qui dispose d’un statut particulier puisqu’elle permet à de simples individus de devenir commerçants en ligne.

Si la presse spécialisée s’interroge encore sur le business model des YouTube et autres MySpace, on notera que le profit ne constitue plus toujours ici l’ultime motivation tant pour des plateformes collaboratives comme Wikipédia que pour le développement des logiciels libres : Open Office, Linux et autres Mozilla.

On notera en marge de ce mouvement, nombre d’expériences et points de vue originaux comme : le site freescape militant pour « une Nouvelle Economie du Savoir » ; ou Pekka Himanen, auteur de l’Ethique Hacker pour qui « La culture des hackers est aussi celle de l’ouverture, du partage » et non de la destruction.

Le Marketing collaboratif tire ses origines du Pinko Marketing, lui-même issu du Manifeste Des Evidences précédemment évoqué :

« PinkoMarketing parle de la fin du Responsable Marketing, du Directeur et de quiconque ailleurs pense avoir le contrôle sur le message, le marché ou la "marque". Les communs... les producteurs... décideront ce qui fera que ce soit "marketable", ce qui marchera, ce qui mourra, ce qui sera ignoré, ce qui sera célébré... tout ce que vous voulez ».

Plus récemment participent au débat des auteurs comme Thierry MailletGénération participation – ou des experts comme Eric Seuillet – créateur d’e-Mergences et plus récemment initiateur de La F@brique du Futur think tank dans le domaine de la prospective et de l’innovation – et pionnier de l’innovation ascendante.

Autre pionnier : Skyrock, la station qui vit en parfaite symbiose avec ses auditeurs, ou Lafraise :

« Lafraise.com est un éditeur de T-shirts en séries limitées de 500 T-shirts, proposant aux graphistes un concours permanent et rémunéré (1000 euros par visuel imprimé). Le but du site est de faire sérigraphier, et de vendre les T-shirts les plus appréciés par les visiteurs de la galerie du site… »

Aujourd’hui Danone, au sein du Vitapole, France Telecom, dans son Explocentre tentent d’appliquer ces théories en entreprise.

Les frontières apparaissent extrêmement perméables entre ces trois démarches, et c’est normal puisque marketings de l’offre, citoyen et collaboratif ne constituent que les trois pôles d’un même univers – que d’aucun nommaient le marché, et qui ne reflète que… notre quotidien

Ce qui autorise toutes les combinaisons et positions intermédiaires possibles : ainsi quand Expedia offre une plateforme de blogs à tous les voyageurs – clients ou non - l’agence en ligne pénètre dans le champ du Marketing citoyen… pas pleinement : contrairement à une plateforme indépendante, elle ne se finance pas par la publicité : elle effectue un investissement dont elle espère un retour.

Et là nous se développe un nouveau type de communication que l’on pourrait qualifier d’heuristique – l’heuristique étant un mode de raisonnement instinctif que nous utilisons quand nous n’avons pas les moyens de trouver une solution rationnelle à un problème. Dans le cas présent, nous parlerons d’heuristique de proximité – mais il existe bien d’autre variante.

La communication heuristique puise ses fondements dans les nouvelles sciences cognitives : nul doute que de beaux jours s’ouvrent à elle pour succéder intelligemment aux dérives actuelle de la communication publicitaire ; elle attend simplement ses théoriciens.

Pour en revenir à Expedia, si demain j’hésite entre les offres de plusieurs agences de voyage en ligne, il y a aura un petit « quelque chose » qui, en une infime fraction de seconde – et totalement inconsciemment – me fera pencher vers elle.

2.   8 WeAreTheMarket

Le 29 Mars 2006, débutait l’aventure Marketingisdead ; trois mois plus tard, avec deux amis, je me lançais dans celle de WeAreTheMarket.

WeAreTheMarket, c’est site Web 2.0 où tout un chacun peut venir en toute liberté, avec ses Coups de Gueule et ses Coups de Cœur. Et surtout ses Envies : et là, il proposera à d’autres internautes de le rejoindre pour améliorer les articles existants, en élaborer d’autres. En un mot : créer produits et services de demain… des produits et services qui lui ressembleront bien plus que ceux aujourd’hui disponibles en magasin.

Il y a bien sûr un côté militant ; pour autant, WeAreTheMarket n’est pas interdit au marque, bien au contraire : au contraire, c’est un espace de dialogue ou citoyens et marques peuvent se retrouver, échanger… et la plus grande récompense pour tous ces gens qui postent des idées viendra le jour où ils retrouveront leurs produits en magasin !

WeAreTheMarket, participe à la fois d’un Marketing citoyen – tout le monde peut s’y exprimer librement sans contrainte – et du Marketing collaboratif – puisqu’il renoue le dialogue entre citoyens et marques.

Mais WeAreTheMarket relève également du Marketing de l’offre : car quand nous décidé de nous lancer dans l’aventure, nous nous sommes simplement dit que c’était dans l’air du temps… et qu’il y avait urgence d’y aller !

Marketingisdead et WeAreTheMarket sont les deux faces d’une même aventure – l’un justifiant nécessairement l’autre, et vice versa.

PS : Pour ceux qui ne l’avaient pas reconnu, le squelette provient du site officiel du groupe mythique : Grateful Dead.

06/02/2007

Marketing is dead… Synopsis – 2ème partie

medium_skeleton_back.3.jpgComme promis, voici la seconde partie du synopsis de mon prochain livre… Marketing is dead.

    4 Le pari Pascalien du marketing

L’avenir du marketing semble reposer sur un pari Pascalien : « Si vous gagnez, vous gagnez tout ; si vous perdez, vous ne perdez rien ».

Si nous nous situons dans une logique de progrès, tous les espoirs sont permis, moyennant quelques adaptations : business as usual. Mieux : de beaux jours s’ouvrent aux agences conseils qui pourront – moyennant de grasses rétributions – initier les annonceurs aux nouvelles approches liées aux nouvelles technologies

Inversement, dans le cas d’une logique de rupture, tout est à reprendre à zéro, ou presque ! Allez développer une politique de prix cohérente quand ce sont les consommateurs qui fixent désormais les règles du jeu : je caricature à peine…

Ce qui explique que dans leur grande majorité, les marketers estiment aujourd’hui que si leur discipline doit s’adapter – ce que nul ne saurait nier – malgré tout, cette adaptation se situe plus dans un cadre évolutif que révolutionnaire : les fondamentaux demeurent. 

Pour les citoyens… la question ne se pose même pas : car là, on quitte le champ de la théorie pour celui du vécu, de la quotidienneté.

Un pari sur le futur donc – et bien aisé, parce que rien ne permet de trancher. Ni dans un sens, ni dans l’autre…

« 2006 marque l'avènement du mobile comme média publicitaire », titrait récemment Le journal du net :  « Outre l'envoi de messages commerciaux par SMS, les annonceurs osent désormais utiliser toute la palette d'outils offerts par l'Internet mobile, du MMS à l'affichage de bandeaux sur les sites Wap. Une expérience tentée avec succès par Coca-Cola France à l'occasion du lancement événementiel de sa nouvelle plate-forme de communication mondiale : "Prends la vie côté Coca-Cola" ».

Dans un même temps, 430 000 particuliers tirent des revenus en commerçant sur eBay, 150 000 en vivent à plein temps. Imaginez 150 000 personnes vivent d’un négoce où les acheteurs notent les vendeurs… et vice versa !

Dans un même temps Murdoch, le magnat des médias traditionnels, casse sa tirelire pour se payer My Space : 580 millions de dollars en juillet 2005. Un an plus tard, c’est au tour de Google de débourser 1,65 milliards pour acheter You Tube : plus de deux milliards au total pour deux plateformes où tout un chacun vient déposer ses musiques, ses vidéos, ce que bon lui semble… Du pur Web 2.0.

Les plus riches investissent à tour de bras – et les marketers prient que la locomotive ne déraille pas et que perdurent leurs modèles ! Tant que demeure l’incertitude, tout le monde y trouve peu ou prou son compte.

2.    5 La logique Web 2.0… et au delà

Impossible de trancher ? En prenant un peu de recul, peut-être…

En prenant un peu de recul, force est de reconnaître que Web 2.0 introduit dans la communication des bouleversements nettement plus profonds que ceux généralement envisagés.

Web 2.0, c’est, certes, la montée en puissance du many to many ; mais ce n’est pas que cela.

La communication Web 2.0 diffère de la communication d’hier – Web 1.0, mais également de toute communication humaine jusqu’au début de ce troisième millénaire – par quatre critères essentiels : elle est plurielle, latérale, inverse et asynchrone.

Plurielle : c’est le fameux many to many, nous ne reviendrons pas dessus.

Latérale et non plus up down : aucune hiérarchie a priori entre bloggers,  aucun ne s’arrogeant pas plus de droits que ses lecteurs.

Inverse : vu la multitude des information mises à disposition, l’impulsion principale vient du lecteur qui organise le sens à sa guise, notamment grâce aux flux RSS. 

Asynchrone : hier, vécu comme une contrainte, l’asynchronisme constitue un avantage : il casse l’urgence, et délite des liens trop formels.

Or une telle communication déroge à deux fondamentaux : la notion de systèmes ouverts, élaborée par Gregory Bateson et ses collègues de Palo Alto ; celle ensuite de modèle inférentiel, édictée notamment par Paul Grice.

En ce sens, elle sape les bases de nos sociétés occidentales, les déstabilise : après l’ère des systèmes fermés – dix-neuvième siècle – puis celle des systèmes ouverts – vingtième siècle –, nous entrons dans celle des systèmes instables.

Bien sûr il faut regarder par delà l’épiphénomène Web 2.0, ce que révèle le succès de ce type de communication – l’usure prématurée des valeurs propres aux société occidentales. La fin de la société dite « de consommation ».

« Il est impossible de ne pas communiquer » notait Palo Alto : la communication structure notre univers… et fonde marketing et publicité ; sauf qu’aujourd’hui « les marchés sont des conversations », pour reprendre le premier principe des fondateurs du Manifeste des évidences… ce qui nous situe bien de la communication de marque classique.

3.   6 Plus qu’une révolution… un débordement !

En résumé, ce qui se passe aujourd’hui ne s’inscrit ni dans une logique de progrès – logique évolutive –, ni même dans une logique de rupture – changement de paradigme au sein d’une même structure… puisque c’est la structure même qui se modifie.

Pour saisir l’ampleur du phénomène, précisons que Web 2.0 n’en est pas la cause – juste le catalyseur ! Car si la structure s’effondre si aisément, c’est peut-être qu’elle était déjà bien minée, pour ne pas dire… bien pourrie ?

Et ce qui gêne une claire vision du dit phénomène, c’est qu’il débute bien avant… Web 2.0 ! Un petit détour par le marché de la musique permettra de mieux le cerner.

Le marché de la musique se révèle extrêmement riche d’enseignements : d’une part, la dématérialisation croissante des contenus autorise des mutations inenvisageables dans d’autres secteurs ; d’autre part, la musique participe pleinement de la vie même des jeunes, tout autant que boire ou manger : or ces derniers maîtrisent mieux que tout autres les nouvelles technologies.

La remise en cause de l’économie de marché dans le secteur de la musique apparaît dès la fin des années quatre-vingt dix avec la montée en puissance du mp3, suivie en 2000 par la mise en ligne de Napster par Shawn Fanning… c’est-à-dire la possibilité de s’échanger à l’échelon de la planète de la musique plutôt que l’acheter.

Commence alors un long bras de fer entre jeunes « pirates » et majors, qui verra l’émergence de nouvelles formules d’échanges décentralisées – le fameux P2P –, des procès plus ou moins médiatiques et quelques projets de loi : ça, c’est la logique de l’affrontement – une logique de rupture, qui détient cependant en soi les germes de bouleversements encore plus radicaux et imminents.

L’étape suivante, je la daterai arbitrairement d’octobre 2005 quand quatre musiciens de Sheffield, les Arctic Monkeys, réussissent l’exploit de placer leur premier single en tête des charts en Angleterre, dès sa sortie. Un record que même les Beatles n’avaient pas battu ! A quel producteur, à quel label talentueux doivent-ils un tel succès ?

Aucun… Ils se sont créés seuls leur propre réputation en tournant dans les salles enfumées d’outre Manche : le bouche à oreille – le Buzz – a fait le reste. Le bouche à oreille… et la mise à disposition gratuite de leur musique sur leur site Internet : un adolescent en a parlé sur son blog, puis un autre et bientôt toute la blogosphère… adolescente.

Ils ont simplement nié l’existence même des maisons de disque – eux et d’autres, comme Clap Your Hands Say Yeah aux Etats Unis – et ça a marché : c’est en cela qu’il ne convient plus de parler de révolution mais de débordement.

29/01/2007

Marketing is dead… Synopsis – 1ère partie

medium_skeleton_back.2.jpgComme promis, voici la première partie du synopsis de mon prochain livre… Marketing is dead.

La polémique qui a vu le jour fin 2006 – et qui n’est certainement pas prête de s’éteindre – sur l’éphémérité, pour ne pas dire l’effet de mode, de Web 2.0 dévoile en réalité deux visions radicalement opposée, non pas de ce que devrait être, mais de ce que va être notre société.

L’emploi du futur – en lieu et place du conditionnel – n’est pas innocent : ce ne sont donc pas deux visions politiques ou militantes qui s’opposent – socialiste versus libérale, solidaire versus individualiste, etc. – mais deux assomptions sur l’évolution probable de notre civilisation.

La question n’est pas : Comment agir sur le monde ? mais : Comment adapter son action d’aujourd’hui selon  ce que sera le monde de demain ? Et dans le cas présent, déterminer si l’on s’inscrit dans logique de progrès ou de rupture…

1.   1 Une logique de progrès versus une logique de rupture

La logique de progrès pourrait s’écrire Web 1.0, Web 2.0, Web 3.0, and so on. Dans une telle logique technologique, le Web collaboratif succède légitimement au Web initial parce qu’intégrant des technologies nouvelles : Ajax, CSS 2.0, syndication Atom ou RSS, etc. Quand le Web descendra dans nos téléphones mobiles débutera l’ère de Web 3.0…

Web 1.0 a vu naître le marketing interactif – avec le click through comme leitmotiv ; Web 2.0, le buzz marketing ; avec Web 3.0, se développeront d’autres formes de ciblage dynamique : marketing et communication tireront toujours le meilleur profit des évolutions technologiques.

La logique de rupture s’intitulerait alors Web 2.0 for ever ! Dans une logique sociétale, le Web collaboratif marque la fin d’une époque, celle du one to many et de la domination le l’émetteur – organe de presse, marque, etc. Peu importe les technologies – reléguées ici au second plan – seule compte la capacité des citoyens à s’exprimer dans un modèle de type many to many. 

Dans une telle dynamique, marketing et communication ne sortiront certainement pas indemnes : non seulement n’importe quel commentaire posté par un consommateur au détour d’un forum ou d’un blog pèse plus que la meilleure campagne de publicité, mais les marques convaincues de « tricherie » – faux blogs, pseudo experts, etc. – sont immédiatement soumises à la vindicte publique.

Logique de progrès et logique de rupture s’inscrivent tout aussi légitimement l’une que l’autre dans  le cadre de l’article fondateur de Tim O'Reilly : What Is Web 2.0.[1] En fait, le fondateur de O'Reilly Media se contente d’opposer ce qui selon lui relève de Web 1.0 – Britannica Online, les sites personnels, etc. – de ce qui préfigure Web 2.0 : Wikipedia, le blogging, etc. Ce qui laisse la porte ouverte à toutes les exégètes !

Seconde remarque, l’opposition logique de progrès versus logique de rupture transcende totalement la simple problématique actuelle du Web 2.0 : car ce que remet en cause la seconde analyse, c’est la vision d’une civilisation en perpétuel progrès – ou plutôt d’un perpétuel progrès comme fondement de notre civilisation. Et en ce sens, elle rejoint – sans les recouvrir, il est vrai – les théories récentes sur une nécessaire décroissance.

2.   2 Logique de progrès

La logique de progrès enfonce ses racines au seuil de l’ère industrielle – car le progrès qui nous concerne ici est bien le progrès technologique. Si la naissance de l’imprimerie a favorisé le développement d’une communication one to many, c’est au dix-neuvième siècle qu’est née une réelle communication de masse avec Émile de Girardin et le développement de la presse populaire.

La logique de progrès, c’est la naissance de la société de consommation – avec ses deux faces : côté sociétal d’une part, avec des citoyens qui accèdent de plus en plus nombreux à une qualité de vie qui leur était totalement étrangère auparavant ; côté commercial de l’autre, avec le développement du marketing et de la communication publicitaire.

Progrès social quand automobile et téléphone abolissent les distances ; quand le lave-linge remplace la lessiveuse, et le réfrigérateur les garde-manger. Un progrès qui ne s’est jamais ralenti, bien au contraire, avec l’arrivée de l’ordinateur et de la téléphonie mobile : jamais produit n’aura pénétré si rapidement son marché.

Et jamais produit n’aura connu pareilles évolutions : un téléphone mobile, c’est tout à la fois, un baladeur mp3, un appareil photo, et avec l’arrivée des nouveaux smart phones, un véritable ordinateur de poche.

« Ensemble des techniques et études d'applications qui ont pour but de prévoir, constater, susciter, renouveler ou stimuler les besoins des consommateurs et adapter de manière continue l'appareil productif et commercial aux besoins ainsi déterminés » selon Kotler, le marketing accompagne étroitement le développement de la société de consommation.

Inscrit au cœur de cette logique de progrès, le marketing saura nécessairement – et doublement – s’adapter aux évolutions technologiques : pour assurer le développement et la promotion des nouveaux produits high tech ; mais également pour utiliser efficacement la complète palette des nouveaux outils communicants à sa disposition.

Bientôt, votre téléphone vous bipera pour vous annoncer la sortie d’un nouveau yaourt au chocolat, voire vous offrir une réduction, quand vous passerez devant le rayon frais de votre hypermarché… et pas celui de votre voisin qui n’achète jamais de desserts lactés de cette marque-là !

Dans cette logique, les petites alertes de ces dernières années – mouvements anti-pub, alterconsommation, échec du Wap, etc. – ne sont que secousses sans lendemain : le consommateur s’appropriant logiquement les outils communicants à sa disposition, devient plus avertis… d’où l’échec de produits et services mal marquetés comme le Wap, d’ailleurs.

Le marketing devra s’adapter à une société en mouvements… comme il a toujours su le faire par le passé. Récemment, Le journal du net dévoilait ses : Cinq clés pour réussir sa campagne de marketing mobile… D’autres, comme Gilbert Reveillon rajoutent une « nouvelle couche de complexité » en militant activement pour un Nano Marketing – un marketing tellement ciblé que presque individualisé.

3.  3 Logique de rupture

Dans une logique de rupture, les petites alertes précédentes ne sont que les signaux précurseurs de lames de fond beaucoup plus graves et violentes.

En fait, gavés de produits souvent totalement dépourvus de sens, les citoyens freinent des deux pieds et ne se laissent plus séduire par les sirènes du progrès technologique ; ils ne se ruent plus sur les dernières innovations high tech, mais attendent patiemment quelques premiers bugs soient corrigés et les prix aient chutés, souvent drastiquement.

En ce sens, l’échec du Wap se relira comme le refus de consommateurs qui, à peine équipés de téléphones mobiles GSM, refusent de s’embarquer dans d’hypothétiques aventures sous prétexte que quelques mois plus tard doit arriver la 3G : pas un service mal marqueté donc – simplement un service de trop. Même remarque concernant le magnétoscope Digital VHS qui n’a tenu que quelques mois en rayons.

Les consommateurs peuvent se contenter de surfer astucieusement, mais passivement, sur une offre pléthorique qui les dépasse : j’achète un téléphone appareil photos baladeur mp3 simplement… parce que, subventionné par les opérateurs, il ne me revient pas plus cher qu’un basique, mais je me garde bien d’envoyer quelque MMS que ce soit !

Plus actifs, ils peuvent avant tout achat se documenter extrêmement précisément sur Internet – en termes de choix, caractéristiques et bien sûr de prix – avant de rendre visite à leur magasin préféré ; et là, obtenir le produit de leur choix au prix de leur choix, face à un vendeur qui ne peut mais ! Aujourd’hui, il n’est plus un distributeur qui ne s’aligne…

Et c’est là que Web 2.0 va tout précipiter. Avant, les consommateurs pouvaient dialoguer entre eux sur des forums soumis au bon vouloir des marques ; maintenant, ils peuvent dialoguer entre eux chez eux. Sur leur blogs, par exemple : Kryptonite, le fabricant d’antivols américain en a fait l’amer expérience le jour où un internaute a mis en ligne une vidéo expliquant comment forcer son produit phare… avec un capuchon de stylo.

Le marketing – le marketing qui s’enseigne en business schools et se dévore dans ces bibles qui s’appellent Kotler ou Mercator – a bien des soucis à se faire : non seulement les consommateurs disposent des mêmes connaissances que les marketers, mais ils disposent d’outils performants et inédits leur permettant de reprendre la main.

Et là, les marketers perdent soudain pied : Vichy lance Le journal de ma peau, le blog d’une jeune fille qui aime peu trop les produits de la marque... et doit le fermer précipitamment, avec des excuses. Plus récemment, aux Etats Unis, c’est Sony et Wal-Mart qui viennent de se faire prendre la main dans le sac de la tromperie grossière.

Dans tous les cas, la supercherie fait long feu : les marketers – le marketing – n’est pas adapté à une société où ce sont les consommateurs qui donnent le la. Qui prennent l’initiative, fixent les règles : un nouveau marketing à inventer ? Mais pourra-t-on encore parler de marketing ?

D’ailleurs il suffit de taper « Marketing is dead » sur Google pour prendre conscience du malaise qui frappe la profession : des dizaines et des dizaines de papiers, certains misant sur l’effet provocateur du propos, d’autres plus pessimistes ; ainsi un dénommé Dale Wolf titre-t-il sur son blog : « Mass marketing is dead but no one seems to have noticed », évoquant un autre expert américain, Melinda Nykamp, qui écrivait dès 2001 :

« Mass advertising does not continue to survive due to its consumer appeal and relevance ; it survives because it is difficult to measure on a return-on-investment basis. It is this very lack of measurement that enables mass advertising to continue – often unchallenged – as a viable communications approach ».

Bref le marketing ne survit que parce que… nul ne sait en mesurer les réels effets !