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11/03/2010

Enquête à Barbès : l'interview

Enquête à Barbès.jpgEmmanuelle Lallement, dont j'annonçais ici la sortie de son dernier livre, a bien voulu répondre à mes questions sur son intérêt pour les espaces commerçants, entre marketing et ethnologie, ou plutôt à la rencontre du marketing et de l'ethnologie.

MarketingIsDead : Qu'est-ce qui t'a conduit à t'intéresser à Barbès ?

Emmanuelle Lallement : Je travaillais déjà, en tant qu’ethnologue, sur la ville et les formes marchandes qui s’y développent, à Paris et ailleurs dans le monde. Je souhaitais analyser la manière dont le commerce façonne la ville, lui donne sa couleur, participe à son identité.

Barbès est un lieu que tout le monde connaît plus ou moins, typiquement parisien et cosmopolite. Mais Barbès c’est aussi l’archétype du commerce populaire représenté par les magasins Tati qui sont sans doute les précurseurs du discount. Un monde marchand aussi intéressant pour moi que celui du luxe.

MarketingIsDead : Le regard d'un ethnologue, c'est un regard extérieur : en quoi ce regard extérieur peut-il nous renseigner sur notre société ?

Emmanuelle Lallement : L’ethnologue travaille sur des situations ordinaires, sur ce qui constitue le familier et le quotidien de nos vies. Par l’enquête de terrain de longue durée, il cherche à saisir le point de vue interne d’une situation.

Il fait le pari qu’en observant minutieusement les lieux, les interactions sociales, en saisissant les paroles en acte, il peut comprendre les logiques, souvent implicites, que nous suivons tous dans les situation de notre quotidien.

MarketingIsDead : En quoi l'ethnologie peut-elle se révéler utile au marketing ?

Emmanuelle Lallement : On entend beaucoup parler d’ethnologie dans le marketing, depuis les méthodes ethnographiques qui sont utilisées pour observer des comportements d’achat jusqu’à l’approche anthropologique de la consommation, en passant par l’ethno-marketing qui intègre les dimensions interculturelles.

Beaucoup d’approches, de méthodes, de perspectives, quelquefois réalisées par des ethnologues de formation, quelquefois improvisées.

Pour ma part je considère que si l’ethnologie peut être utile au marketing, c’est précisément pour saisir et comprendre tout ce qui, dans les relations d’échange, échappe au marketing.

08:44 Publié dans Interviews | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook | | Pin it!

07/03/2010

Enquête à Barbès

Enquête à Barbès.jpg"Barbès : ce nom qui désigne l’un des espaces commerçants les plus connus et les plus populaires de Paris, résonne comme une évidence.
De la fameuse enseigne Tati aux multiples bazars qui s’étendent le long des boulevards Rochechouart et Barbès, du marché aux tissus Saint-Pierre aux marchés alimentaires Dejean, chacun a en tête l’image d’un
"quartier des bonnes affaires", du "pas cher" et de "l’ethnique bon marché" où se croisent des populations de toutes origines, dans une atmosphère de foire permanente".

Mais qu’est-ce qui "fait" Barbès ?

Telle est la question que pose - et à laquelle s'attache à répondre, bien évidemment, Emmanuelle Lallement, ethnologue, maître de conférences au Celsa, et membre du comité scientifique de l'Adetem, dans son dernier ouvrage : La ville marchande : enquête à Barbès.

Un livre conseillé à tous les marketers (entre autres) qui pensent qu'il n'y a pas que le luxe dans la vie, mais qu'un regard différent, presque étranger, permet de mieux comprendre notre société.

Les participants à la dernière Journée Nationale des Études, organisée en Janvier dernier par l'Adetem et l'Uda, ont pu en découvrir quelques "extraits" ; les autres pourront rencontrer Emmanuelle lors d'une séance de dédicaces, le jeudi 18 mars 2010 à partir de 18 heures à la librairie Lieu commun, 5 rue des Filles du Calvaire - 75003 Paris.

12:26 Publié dans Actualité | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook | | Pin it!

06/03/2010

Daniel Bô et le Brand Content

Brand Content.jpg"Le marketing de la "part de cerveau disponible" a fait son temps. Dans la publicité, le marketing digital, les modes de ciblage ... les initiatives se multiplient et de nouvelles approches se mettent en place. Quelles sont les réponses des marques innovantes et comment recréent-elles de la valeur d’envie ?"

"En complément des messages publicitaires traditionnels, les marques produisent aujourd’hui des contenus éditoriaux de plus en plus élaborés (mini films, magazines, jeux vidéos, web tv...) jusqu’à devenir des médias à part entière. Le brand content est en plein essor."

Ne vous y trompez pas : les deux phrases, qui semblent si bien se compléter, ne sont pas du même auteur ... même si le "brand content" de Daniel Bô peut constituer une réponse efficace aux bouleversements en cours évoqués par Nicolas Riou - voir son interview ici.

C'est pourquoi le mardi 23 mars, le Club Marketing 2.0 de l'Adetem vous propose de rencontrer ces deux auteurs pour un échange fructueux sur le nouveau marketing :

- Nicolas Riou pour : Marketing anatomy : Les nouvelles tendances marketing passées au scanner.
- Daniel Bô pour Brand Content : Comment les marques se transforment en médias.

Pour s'inscrire, c'est ici.

Et en avant-première, petite interview de Daniel Bô.

MarketingIsDead : Quelle différence fais-tu entre branded content et brand content ?

Daniel Bô : Les modalités du mariage entre les marques et le contenu sont très nombreuses : le branded content correspond à une logique de rapprochement ou d’association, et le brand content correspond à une logique d’édition proprement dite.

Le branded content désigne toute opération  de communication qui implique un rapprochement ou un partenariat entre une marque et un contenu, préexistant ou non. Le contenu est "brandé", c’est-à-dire que la marque a été rajoutée, mais le contenu peut exister sans elle, et peut être associé à une autre marque : branded est utilisé comme adjectif du contenu : le sponsoring, le parrainage sont des exemples de branded content.

Certaines marques font plus que rapprocher des éditeurs et des créateurs de contenus : elles créent elles-mêmes leur propre contenu. La marque assume un statut d’éditeur, finance et fabrique un contenu à partir de son propre fonds. Elle est l’initiateur du contenu, qui n’aurait pas vu le jour sous sans elle : brand est utilisé comme un substantif, les mini-films Bmw, les guides de voyage Louis Vuitton sont des exemples de brand content.

MarketingIsDead : A l'heure des User Generated Content, des contenus générés par les marques, c'est pas un peu obsolète ?

Daniel Bô : Le phénomène des UGC est concomitant de celui du développement des contenus de marques. Les contenus de marques sont faits pour être consultés, partagés voire créés ou co-réalisés par les consommateurs eux-mêmes.

La logique initiale de transmission de message repose sur une communication unidirectionnelle sans voix de retour ni possibilité de dialogue. Elle suppose de capter l’attention avec un message mémorisable, claire, attribuable, focalisé sur le produit ou la marque. Pour transmettre les messages, les marques doivent capter l’attention en jouant sur le message lui-même (taille, volume, humour, séduction, etc) et en parasitant d’un contenu éditorial qui a fait le travail de capture de l’attention (en se mettant à côté, dessous, dedans).

Avec le développement des réseaux sociaux, la modification des paramètres de prise de parole évolue dans plusieurs directions :

- on passe de la transmission de message à la transmission de contenu : c’est le brand content,
- on passe de la transmission de message au partage de message voire de contenu.

Le lien sera d’autant plus fort si le public partage autour des contenus, peut lui-même participer à leur création ou s’en servir pour enrichir leurs propres relations privées. De plus en plus de marques mettent leurs contenus à disposition des réseaux sociaux afin que les consommateurs puissent commenter, échanger autour des contenus. Le contenu devient un ingrédient indispensable à l’animation des réseaux sociaux.

Le cas Axe Muchas Maracas l’illustre bien. Il s’agissait de lancer une danse de l’été 2009 avec une chanson originale "qui a les plus grosses maracas?", un clip avec une chorégraphie. Le clip s’est hissé très vite en tête des vidéos sur Youtube, et surtout les gens se sont réappropriés la chorégraphie : ils l’ont dansé dans les campings, les fêtes de fin d’année, en se filmant eux-mêmes et postant leurs vidéos sur les plateformes de partage. C’est la force du bon contenu : il est réapproprié et se dissémine partout sous des formes imprévisibles au départ.
Des entreprises comme Eyeka se sont spécialisées dans l’appel à projet en s’appuyant sur un réseau de volontaires motivés pour contribuer et nourrir la marque en contenus. La communauté Eyeka était invitée dernièrement à réaliser des vidéos sur le thème de l’hybride pour tous (pour la marque Honda).
Les contenus peuvent être le pivot d’un échange renforcé entre la marque et les consommateurs. La marque Audi souhaitait animer sa relation client et nourrir son programme de fidélisation en offrant aux propriétaires d’un véhicule Audi des contenus exclusifs de qualité : la plate forme www.myaudi.fr réservée à 30 000 membres parmi les clients les plus fidèles de la marque donne accès à des programmes musicaux inédits (coulisses de concerts, clips en exclusivité, vidéos rares, interviews, etc.). La marque peut en outre offrir des invitations VIP à des concerts et des événements privés.
MarketingIsDead : Comme bien souvent le story telling, le brand content, ce n'est pas souvent une fuite en avant pour des marques qui n'ont plus rien à proposer de concret
Daniel Bô : Le brand content c’est tout sauf une fuite en avant. C’est à la fois une relation plus riche, plus désintéressée, plus humaine, plus authentique plus directe. Je suis convaincu que le contenu de marque est appelé à grand avenir car il suscite l’enthousiasme (lorsqu’il est de qualité) et répond à la logique du digital (où la communication de marque ne peut fonctionner que si c’est un contenu recherché par l’internaute).

En attendant d’en parler le 23 mars à l’Adetem, je dirai que le brand content repose sur 3 piliers :

- le brand content apporte quelque chose de valeur : la communication est un service à part entière qui se suffit à lui-même (divertissant, informatif, pratique) intéressant avant d’être intéressé
- le brand content adopte une communication rayonnante : au lieu de se focaliser sur un aspect d’un produit, la marque cherche à l’intégrer dans un ensemble plus vaste
- le brand content s’adresse à une personne : le contenu se présente comme un don adressé à une personne (et pas seulement à un consommateur).

Si je prends l’exemple du DVD Pampers qui explique comment le bébé perçoit le monde dans le ventre de sa mère, on a bien un contenu qui a de la valeur en soi. Ce contenu ne se focalise pas sur l’efficacité de la couche mais englobe plus largement l’univers du bébé. Ce DVD permet de créer une relation privilégiée et désintéressée avant même que le bébé soit né.

La marque de luxe Louis Vuitton est devenue en quelques années tout à la fois maison d’édition, galerie d’art et documentariste, en plus ses activités de fabricant d’articles de luxe. Une offre de contenus culturels est venue enrichir et nourrir le positionnement de la marque autour du thème du voyage, dont les produits (bagages et articles de maroquinerie) ne sont finalement qu’une dimension. La marque vend désormais en librairie et dans ses boutiques des "city guides de voyage", dont on ne saurait dire s’il s’agit d’une diversification produit ou de la communication de marque. Des modules vidéos guident l’internaute dans les rues d’Edimbourg avec Sean Connery, mais aussi avec Catherine Deneuve à Paris ou Francis Ford Coppola à San Francisco, sa fille à Marrakech... Ça ne ressemble pas à une fuite en avant.

17:32 Publié dans Interviews | Lien permanent | Commentaires (0) |  Facebook | | Pin it!