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09/02/2009

Pour prolonger la Journée des Etudes

Bo.jpgPour prolonger les débats d'une Journée des Etudes (coorganisée par Adetem et Uda) extrêmement riche, j'ai posé quelques questions complémentaires à plusieurs intervenants.

Premier à répondre présent, Daniel Bô, Président de Qualiquanti, dont je vous recommande également le blog : Marketing études.

MarketingIsDead : Tu me disais avant ton intervention qu’un questionnaire doit être une "expérience culturelle enrichissante". N’est-ce pas exagéré ?

Daniel Bô : Je ne dis pas que c’est toujours possible, mais ça doit être un objectif.

Lorsqu’on regarde le paysage des questionnaires proposés sur Internet, je constate qu’ils sont de plus en plus soignés sur le plan du design, mais souvent fastidieux et décevants.

Les questionnaires online sont imprégnés d’une culture rationnelle, informatique et technique et s’inspirent beaucoup du CATI. Le début du questionnaire à base de filtres jette une partie des interviewés inadéquats comme des malpropres. Le titre de l’enquête est rarement attirant et l’entrée en matière est mécanique. Même des questionnaires signés par des marques et adressés à des clients instrumentalisent les répondants.

La bonne volonté des répondants est maltraitée et ce n’est pas avec des incentives symboliques qu’on peut rattraper cette tendance à la démotivation. Pour le secteur des études, la bonne volonté des interviewés est une matière première quasi gratuite, il faut la préserver.

L’individu prend le contrôle, et le sait : on le voit dans tous les domaines du marché. Il n’y a pas de raison que les études échappent à cette tendance. Imagine que demain on arrête quelqu’un dans la rue pour une enquête et qu’il réponde "C’est 100 euros ou rien" (c’est déjà le cas pour certaines études B2B) ou que la jeunesse considère les enquêtes comme inutiles, inintéressantes et se détournent systématiquement.

Les conditions de possibilité de l’enquête seront très sérieusement compromises. Le développement durable des études passe donc par la stimulation et l’entretien de cette motivation.

MarketingIsDead : Comment s’exprime cette démotivation des interviewés ?

Daniel Bô : La démotivation affecte surtout les modes de recueils quantitatifs.

Elle concerne aussi bien le online que le téléphone ou le face à face. On peut citer quelques procédés qui altèrent la relation, démotivent les interviewés en favorisant des réponses bâclées :

- Taylorisation et anonymisation de l’enquête (pas de vrai échange, mais simple recueil où l’on pompe l’interviewé),
- Sélection massive d’individus «piochés» (pas considérés comme des personnes mais comme des échantillons),
- Questions ennuyeuses et répétitives « à la chaîne », batterie d’items multiples très éloignés d’une conversation, non naturelle, sans émotion,
- Filtres qui créent une relation asymétrique et non réciproque avec les interviewés.

Beaucoup de sociologues (les bourdieusiens, mais pas seulement) dénoncent depuis des décennies le manque d’égard vis-à-vis des interviewés considérés comme des cobayes disponibles.

Dans L’ivresse des sondages, Alain Garrigou pointe notamment" et "la coopération nonchalante" voire le refus de répondre des interviewés, dans un contexte de prolifération et de banalisation des sondages. Il met en garde vis-à-vis de la "mise en chiffres" de la "fantomatique opinion publique".

Les psychologues cognitivistes ajoutent la nécessité pour les enquêtes de capter les réactions émotionnelles des consommateurs. Les questionnaires quantitatifs standardisés font la part belle au rationnel au détriment de l'émotionnel. Ils mettent surtout l'interviewé dans une posture peu favorable à l'émotion.

Les études quantitatives font appel essentiellement au rationnel et oublient que nos capacités rationnelles s’ancrent d’abord sur nos émotions. L’émotion stimule l’activité cérébrale, et permet des réponses plus justes, plus investies, plus prédictives. Les questionnaires ennuyeux ou répétitifs, où l’on doit simplement cocher quelques cases suscitent peu d'émotion.

MarketingIsDead : En quoi les questions ouvertes constituent-elles une solution au problème de démotivation ?

Daniel Bô : C’est une partie de la solution. Les interviewés, plus particulièrement les latins, refusent d’être enfermés dans des questionnaires dans lesquels ils se sentent mal pris en compte et qui nient leurs spécificités.

La culture de l’enquête par questionnaire fermé convient mieux à la culture anglo-saxonne. Aux USA, les écoliers et étudiants sont évalués via des QCM alors qu’en France on est plus dans la culture de la copie, de la rédaction à la dissertation.

Les formats de questionnaires fermés standardisés empêchent l’expression de l’individualité et renvoient sans cesse le fait que l’individu s’inscrit dans une masse. L’américain l’accepte plus facilement car il valorise le fait d’appartenir à une communauté. Les questionnaires semi-ouverts permettent à chacun, s’il le souhaite, d’exprimer sa touche personnelle (qu’il est obligé de refreiner dans les enquêtes fermées).

Lorsqu’un interviewé répond à un questionnaire online fermé, il a l’impression de s’adresser à un ordinateur. Il n’aura pas de scrupule à jouer avec la machine. S’il y a des questions ouvertes, il aura le sentiment de s’adresser à quelqu’un qui va le lire et cela change totalement la posture.

L'approche semi-ouverte a le mérite de favoriser l'état émotionnel par les questions ouvertes qui permettent aux individus de s'associer à leur expérience et leur ressenti. Il faut s’efforcer de rendre les questionnaires stimulants et vivants par tous les moyens (sujet intéressant, ergonomie impliquante, plaisir esthétique, support à la réflexion et prise de conscience d’un sujet, intégration de stimuli, etc.).

Ce n’est pas un hasard si les modes de recueil qualitatifs (entretiens, groupes, quali online, etc.) ne sont pas touchés par ce problème.

MarketingIsDead : Comment peut-on concrètement construire ces expériences enrichissantes ?

Les instituts d’études doivent passer d’études mécaniques à des études émotionnelles. Ils doivent chercher à susciter l’enthousiasme des interviewés. La première chose est de se mettre à la place de l’interviewé et de trouver des manières de stimuler l’activité cérébrale.

Il faut cesser les conceptions formalistes et les techniques, plus scientistes que scientifiques, qui manquent presque toujours l’essentiel, en se fixant sur les signes extérieurs de la rigueur.

Voici quelques règles de base pour construire un questionnaire motivant débouchant sur une expérience impliquante :

- Le sujet doit être intéressant et s’il ne l’est pas a priori, il faut le rendre intéressant.
- Se sentir guidé dans le déroulement de l’enquête
- Des questions précises et immédiatement compréhensibles
- Le sentiment de pouvoir s’exprimer et d’être utile
- Une enquête qui fait le tour du sujet
- Une enquête ludique et animée
- Une durée d’interrogation en adéquation avec le niveau d’implication
- Un format de questionnaire qui favorise une réponse réfléchie : voir à ce sujet nos réflexions sur le questionnaire panoramique vs séquentiel.

Chaque enquête doit être l’occasion pour l’interviewé d’apprendre sur soi et sur le monde. Le questionnaire doit donner des infos, susciter des réactions, mobiliser les émotions, les souvenirs, le ressenti, l’imagination. Les interviewés doivent recevoir dans la mesure du possible des feedbacks en cours ou en fin de questionnaire.

MarketingIsDead : Des exemples de questionnaires "stimulants" ?

Daniel Bô : En éditorialisant certains questionnaires, on peut doubler le taux de retour alors qu’au final les mêmes questions auront été posées.

Le configurateur proposé par Harris Interactive où l’interviewé construit son offre idéale à l’aide d’un logiciel montre qu’une interrogation peut se faire sous forme de jeu.

Le phénomène du Tryvertising illustre une voie possible puisque dans le Sample Lab à Tokyo des interviewés paient pour accéder en avant-première à des nouveaux produits et pour donner leur avis. Dans ce cas, on joue sur la curiosité des consommateurs vis-à-vis de la nouveauté.

Une dotation originale ou l’envoi d’un produit à essayer à domicile sont des moyens simples de mobiliser l’intérêt.

La contextualisation des questionnaires est un puissant levier car on constate que les interviewés sont très motivés pour s‘exprimer lorsqu’on les interroge juste après un achat ou une expérience.

Le développement de formats d’interrogation sous forme de forums-questionnaires où les répondants peuvent échanger entre eux constitue un remède à l’isolement de l’interviewé, seul dans son couloir.

Un moyen à la portée de tous pour dynamiser un questionnaire consiste simplement à mettre des supports tout au long du parcours (images, vidéos, liens vers un site web, etc). Cela permet à la fois d’introduire des stimuli émotionnels et de gratifier l’interviewé en lui apportant de l’information ou du plaisir.

Dans un questionnaire pour le magazine Elle, nous avions demandé à des femmes de "décrire un souvenir de corps d’homme qui vous a particulièrement ému", puis nous les avions fait réagir à quelques visuels d’hommes dénudés.

La satisfaction des interviewées en fin de questionnaire était manifeste. Tous les sujets ne sont pas aussi stimulants, mais il y a des potentialités qui ne demandent qu’à être exploitées.

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04/02/2009

La publicité selon Google

Ça, c'est le titre d'un intéressant article de Libération.

Bouygues 1.jpg

Et ça, ce sont les liens commerciaux proposés par Google ...

Bouygues 2.jpg

Bouygues Telecom condamné en appel à démonter des antennes relais ? Tant mieux, souscrivez un abonnement Pro !

C'était la rubrique les apparentements terribles !

La seconde annonce est plus intéressante : serait-ce le mot Bouygues Telecom qui provoque le lien vers un site contre les dangers des portables ?

On peut espérer que c'est plutôt antennes relais ... mais franchement, être ainsi pris en sandwich, pas vraiment génial !

Crise de la consommation ou pas de côté ?

Drapoport.jpgL'invitée du jour, c'est Danielle Rapoport, Directrice de DRC, études et conseil.

Assistons-nous en direct à la fin d’une mécanique de consommation telle que nous la connaissons depuis plus de quarante ans et à la radicalisation de nouveaux comportements ?

À écouter ce que les consommateurs eux-mêmes nous en disent, il semblerait que oui, et que ces changements ne relèvent pas d’une crise mais d’une logique, d’une évidence réactive au contexte économique et social actuel. Et plus profondément, d’une recherche de consonance entre ce qu’ils perçoivent de l’offre de produits notamment de la grande consommation, et de leurs propres comportements d’achat qu’ils jugent parfois sévèrement.

Gaspillage, conséquences délétères pour l’environnement, inégalités dans l’accès à la qualité, risques d’addiction par des offres trop tentatrices … autant de critiques qui révèlent aussi une déception sous jacente, celle de ne pas avoir reçu de « récompense » de la part des marques (au sens large du terme) face au poids de la « dépense » dans l’acte d’achat : argent, temps, difficulté de choisir qui demande un véritable travail de tri des informations nécessaires, peurs liées aux risques sanitaires, effets négatifs de l’absence de confiance …

Ces aspects délétères de la consommation montrent que celle-ci a perdu de son innocence et qu’il convient de jouer différemment le lien entre acteurs de l’offre et acteurs de la demande.

En quoi consisteraient ces nouveaux liens, ce nouveau regard sur des individus qui ont fait un « pas de côté » et proposent, par la tangente, de nouveaux modèles à leur échelle ?

Leur démarche en « crabe », parfois réactive et souvent créative, relève d’une mise à distance critique et d’une revendication d’être réellement reconnus comme acteurs piliers de la « croissance », par ceux-là même qui les désignent ainsi. Si les inégalités sont si grandes entre marges réalisées par les marques et leur accès difficile par un prix trop élevé, si elles prêtent si peu d’attention à leurs acheteurs, continuent leur course au profit dans un courtermisme, une myopie, une surdité, une absence de reconnaissance propres à décourager les plus fidèles, pourquoi continuer de les aimer et ne pas aller « voir ailleurs », se relier à des offres plus généreuses et qui fassent rêver, ou moins onéreuses et génératrices de pouvoir d’achat ?

Le « pas de côté » correspond à un déplacement de la norme consommatoire, qui jusqu’ici pouvait se résumer à une équation simpliste : provoquer le besoin (en principe limité) sur le mode d’une sollicitation du désir (par essence illimité) qui mène les personnes à devenir des « consommateurs », en réponse immédiate et émotionnelle à des stimuli, soumis à des pulsions irrépressibles, dans une omniprésence du présent.

Le « pas de côté » réhabilite l’idée que le consommateur est symptôme et partie prenante d’un contexte socioéconomique et qu’il cherche à le faire savoir par des comportements à sa mesure. Caisse de résonance et acteur à la fois, les solutions qu’il élabore sont éminemment pragmatiques : sauver ses sous, amenuiser son sentiment de perte – pouvoir d‘achat, travail, statut, désir - s’inscrire dans des valeurs qui privilégieraient « l’humain », le lien, la proximité, la participation, la contribution. Sur ce dernier point, Internet lui facilite la tâche, dans ce qu’il permet de communication horizontale (« C to C ») et de création de pôles de confiance.

Ce « pas de côté » est aussi la cristallisation d’attitudes que nous avions décelées au début des années 90, notamment en termes de perte de confiance vis-à-vis des institutions. L’angoisse de l’avenir et la focalisation excessive sur le présent ont été les conséquences négatives de l’incapacité des institutions et des marques à proposer autre chose que des stimuli au présent - innovations sans valeur ajoutée rendant l’offre plus confuse, les choix plus difficiles, le gaspillage et l’obsolescence plus répréhensibles.

Si certaines entreprises en ont tiré des leçons, mettant « le consommateur au cœur des préoccupations », d’autres se sont emparées de la formule sans en appliquer les conséquences. Le besoin de maîtrise pour compenser des achats plaisir marque une reconfiguration du désir en questionnant ses vrais besoins.

S’y ajoute une sensibilisation à l’idée de « limite », dans la dénonciation du « trop », d’une obésité de l’offre dans sa redondance absurde. La question de la limite est aujourd’hui renforcée par les grands enjeux environnementaux qui nous obligent à une conversion radicale des systèmes de production, de fabrication, de distribution et de consommation, où posséder, détruire, abuser des ressources, s’imposent comme des contre-valeurs et devront générer des contre-pratiques plus respectueuses … sous conditions de conviction à tous les niveaux, ce qui est loin d’être le cas !

Pour les individus, leur permettre des actes engageants renforçant leur sentiment d’utilité (les petits ruisseaux faisant les grandes rivières).

Pour les entreprises, associer le court terme au long terme du durable, et rendre leurs offres cohérentes, crédibles, accessibles et désirables.

Pour les médias, convertir leurs stigmatisations dramatisantes et culpabilisantes en informations utiles.

Pour les publicitaires, cesser de s’abreuver au « filon vert » sous perte de lasser leurs publics et de décrédibiliser les marques qu’ils veulent défendre.

Les consommateurs ont montré depuis près de 20 ans leur obstination à réclamer leur dû tout en exprimant, pour certains la nécessité de leurs devoirs, à condition d’inscrire ceux-ci dans une vraie réciprocité. Cette « co-reconnaissance » - lien positif et synergique entre l’entreprise et les consommateurs - viendrait réparer un sentiment d’impuissance plutôt partagé chez les consommateurs – mais aussi les salariés.

Ce sentiment est, du point de vue psychologique, ce qu’il y a de pire.

Pire que la dissonance, quand les acheteurs naviguent entre « low cost » et attrait pour une fabrication locale plus chère. Pire que la frustration, dont on peut se convaincre qu’elle est choisie via des arbitrages « astucieux » et « intelligents », l’envie de faire du vide et adopter des comportements plus justes pour soi-même. Pire que l’absence de confiance qui a donné lieu à la construction compensatoire de nouveaux liens et lieux de proximité et des choix de confiance par la preuve. Pire que le sentiment de « perte », qui peut se retourner en gain matériel et psychologique, comme le sentiment de compassion, quand la visibilité de la très grande pauvreté relativise la sienne propre. Si les consommateurs choisissent d’acheter moins pour s’offrir du « mieux » et donner au superflu des vertus de sens - ce qui est perceptible dans la baisse constatée en volume des achats en hypermarchés quand la valeur ajoutée n’y est pas perceptible – le rétablissement de la confiance suffira-t-elle à renverser la tendance ?

S’il ne faut pas compter encore sur une « consommation citoyenne » - acheter plus cher pour sauver des emplois par exemple - il faudra des marques, des entreprises qui fassent lien, et aident les individus à trouver dans leurs offres et services un « collectif de confiance ». Elles récupèreront de ce fait le statut de « puissances bienveillantes » qui leur fait tant défaut aujourd’hui : produire du futur et redonner de l’espérance à l’ensemble du système.

Chronique également publiée dans Les échos.

02/02/2009

Quand musique et politique mènent la danse

Olivier.jpg

L'invité du jour, c'est Olivier Covo, directeur associé et fondateur de Brandy Sound.

En ce début d’année d’investiture de l’espoir aux Etats-Unis, il est intéressant de noter à quel point la musique est un catalyseur émotionnel lorsqu’il faut parler au cœur des gens. Dans ce processus démocratique, information, communication et propagande font beau jeu dans le rationnel (et l’irrationnel) d’une campagne.

Petite analyse comparée de deux de nos leaders maximo, d’un côté et de l’autre de l’Atlantique.

Quand la petite musique parle au cœur de nos ouailles, il est plus aisé de faire passer des messages ou des réformes plus dures parce que la musique qui est un cri qui vient de l’intérieur adoucit résolument les mœurs.

Dans le grand jeu du marketing politique, on notera que le marketing dit sensoriel a pris une part importante pour mieux toucher le consommateur, plutôt le citoyen, pour mieux consommer les produits (les promesses) qu’on lui sert.

La musique est l’un des éléments de support à l’entertainment proposé par nos showmen politiques. Que ce soit par l’utilisation de la musique en soutien à un discours pour densifier la charge émotionnelle et passer un message aussi dur qu’il soit, ou en s’associant à des Artistes de renom ; les hommes politiques savent bien exploiter les ficelles du marketing musical.

En France, la marque Sarkozy s’associe pour le meilleur et pour le pire à une Artiste – technique dite (même si ce n’était pas obligatoirement calculé) dans le jargon professionnel de « l’endorsement » - on s’associe à une caution artistique à forte image et notoriété pour en profiter soi-même.

On peut ne pas adhérer aux idées portées par Nicolas Sarkozy et dans le même temps adorer l’artiste Carla Bruni – Comme le dit Jean-Luc Mélenchon, Président du Parti de Gauche. Lorsque Johnny Hallyday apporte sa caution à Optic 2000, la marque profite du capital de sympathie et de séduction de la personnalité Hallyday pour sublimer Optic 2000. Même combat pour Monsieur Sarkozy qui ainsi s’associe à toute la sympathique petite musique de « quelqu’un m’a dit… ».

Plus tactique au moment du coup de chaud des banlieues, Doc Gyneco a pris l’habit de l’endorsement pour rendre l’image de notre président plus jeune, plus populaire et plus proche des jeunes. Il s’y est brûlé les ailes car le « mariage » entre la marque et l’artiste n’était guère cohérent. C’est un peu ce qui se passe par exemple entre une Olivia Ruiz et Coca Cola, personne n’y croit vraiment.

Nicolas Sarkozy n’a d’ailleurs jamais eu la sympathie de l’univers du Rap et du Slam qui reste contestataire au système qu’il représente. On peut dire en conclusion que notre président, qui a résolument le sens du rythme politique a trouvé une couleur musicale plus soft qui lui confère une profondeur propice à mieux éclairer sa posture d’homme d’état.

Alors que Monsieur Sarkozy cherche à s’associer à des Artistes, Les Artistes s’associent à Obama et chantent ses louanges. Comme le dit très justement Barack Obama, « Motown* a fait de moi l’homme que je suis ». Yes, we can !

C’est bien sûr la posture du nouveau président qui symbolise un changement énorme mais aussi la nature du discours qui est dit et raconté avec un rythme et une musicalité qu’envieraient beaucoup de stars de la Pop, du R&B, du Rap et de la Soul. Signe que diversité raciale et réussite pouvaient aussi exister pour cette communauté dans le contexte historique des Etats-Unis d’Amérique.

Cet homme a non seulement le sens du rythme, mais il sort de sa bouche une petite musique où il ne manque que les instruments pour soutenir et densifier émotionnellement le discours. Les musiciens, ainsi que les communautés Afro ou Latino … ne s’y sont pas trompées et ont, par le vecteur de différents artistes donnés de la voix à Obama, si j’ose dire. Montre-moi ta musique, je te dirai qui tu es.

Mais aussi pour l’évocation, cela rappelle le temps des conteurs qui louangeaient les bienfaits de leurs héros en musique pour transmettre la bonne parole.

En termes techniques, nous sommes là dans le registre de la synchro musicale à l’image. Un clip, une star, une musique et une belle histoire pour soulever la liesse et réveiller l’humanité qui est en chacun de nous. Pour citer le plus connus et pour ceux qui ne l’ont pas vu, je conseille très fortement ce clip fait par des artistes américains qui reprennent les phrases de Barack Obama et les chantent en cœur.

Une vraie leçon de bonheur, d’ailleurs récompensée d’un Emmy Award. Obama apparaît de temps en temps en « split image » où on le voit dire son texte à côté de l’un des chanteurs - ce qui renforce encore la charge émotionnelle. C’est une vraie leçon de marketing politique.

Ce qui prime n’est pas autant ce qu’il dit que la façon dont il le dit. Standing ovation assurée … Ce clip a d’ailleurs fait le tour du monde en bien moins de 80 jours.

Alors, qui de nos deux leaders maximo maîtrise le mieux la petite musique politique ? Les techniques sont différentes et vieilles comme le monde mais on a affaire assurément à deux communicants d’envergure.

Tous deux ont bien compris que c’est le chant des sirènes qui nous touche à l’âme. Si la musique sert à transporter les mythes, et si en politique les mythes ne font pas toujours de bonnes réalités, il ne faudrait pas, un peu comme dans un bateau ivre, avoir à se boucher les oreilles.

Pour ne pas succomber à ces voix irrésistibles qui connaissent la musique, mais ne nous la font pas toujours partager !

* Motown, c’est le label soul qui a révélé les plus grands chanteurs afro-américains – Stevie Wonder, Marvin Gaye, Diana Ross ou en encore Michael Jackson.