30/09/2013
La crise est à venir … et en attendant, le marketing ?
En attendant la crise – la vraie, pas la Crise cache-sexe des politiques et des économistes, ses nouveaux prêtres –, que peut faire de marketing, sinon s’adapter ?
Les inégalités s’accroissant, deux solutions : cibler en priorité les plus riches – mais de moins en moins nombreux – ou les autres – extrêmement nombreux, mais désargentés.
Cibler les plus riches, tout le monde en rêve et presque tout le monde y pense : quand on leur demande un plan marketing, la majorité des étudiants ne pense qu’à des positionnements de luxe. Et c’est vrai, le luxe constitue un des rares secteurs à ne pas souffrir de la crise ! Mais non seulement le luxe se vend mal chez nous – sauf aux touristes étrangers : le luxe est un produit d’exportation – mais c’est un segment étroit : par essence, les produits de luxe ne visent pas le plus grand nombre.
On vous parlera d’Apple, qui a réussi à imposer ses smartphones au monde entier – et de son inégalable capacité d’innovation, son incroyable storytelling, etc. – mais le leader s’efface aujourd’hui derrière Android – très loin derrière même ! Certes, le luxe – et le haut de gamme – ne se vendent pas qu’aux ultra riches : la classe moyenne supérieure aussi aspire au rêve ; mais elle oscille simplement entre ses envies et … ses moyens.
Sinon, la cible majoritaire du marketing – et celle de tous les produits de consommation courante – c’est une cible en perte de pouvoir d’achat : aux marketers de s’adapter.
Comme les politiques, ils font le gros dos : c’est la Crise, alors on casse les prix – mais de manière ponctuelle. Il suffit de visiter une galerie marchande de banlieue un samedi après-midi pour s’en convaincre : le faux marbre est nickel, les boutiques regorgent de produits et à une extrémité, l’hypermarché draine des flux ininterrompus de consommateurs.
A l’autre, la FNAC offre smartphones et tablettes à l’envie des chalands : on se demande si les journalistes spécialisés ne galéjent pas un peu quand ils déclarent l’enseigne au bord du gouffre, comme Surcouf hier.
Oui, c’est business as usual et tout le monde joue le jeu : les vendeurs qui sourient et les clients qui font semblant de pouvoir se payer tout se qu’ils découvrent en rayons.
La réalité est ailleurs.
A la caisse d’un Lidl de lointaine banlieue où une quinquagénaire pose le contenu de son charriot sur le tapis roulant et demande à la caissière d’arrêter d’enregistrer à partir de 21,50 euros : tout ce dont elle dispose encore en liquide, elle ne veut pas prendre le risque d’un chèque en bois. Elle abandonnera quelques paquets de pâtes et de charcuterie …
A Aignay-le-Duc, en Bourgogne, ou un automobiliste s’arrête à la station service pour « prendre 5 euros », dixit le Monde de ce 22 septembre : « On va entrer dans la dernière semaine du mois, celle où les voitures commencent à rouler de moins en moins ».
Les ultra pauvres ne constituent pas une cible très porteuse … bien que, hélas, très réelle ; et puis, très proche, il y a celle de ceux qui sentent le plancher se dérober sous leurs pieds : la population de base des hypermarchés et autres supermarchés, des centres commerciaux banlieusards – ceux qui calquent en partie leur consommation sur les précédents, parce qu’ils ont peur de claquer tout le fric qui leur reste encore.
Leur consommation n’est pas nécessairement triste : il suffit de se balader dans une brocante pour les voir échanger gaiement, dehors de tout circuit marketé ; ils se retrouvent en ligne sur le Bon Coin, et surtout, ils commencent à se regrouper pour se proposer – entre eux – des produits et surtout des services plus abordables … d’où le succès des sites de covoiturage par exemple pour éviter de ne plus pouvoir se déplacer « la dernière semaine du mois », et même le mois entier.
Les consommateurs s’organisent, parce que pour eux, il ne s’agit pas d’attendre que passe la Crise : juste une question de mieux vivre, sinon de survie. On nomme ça, la consommation collaborative, j’en ai déjà parlé ici.
Les marketers, eux, balancent quelques promotions pour faire un peu de dégagement, et allument quelques bougies sur l’autel de la Crise en espérant une improbable reprise : business as usual …
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