09/07/2012
A qui appartiennent les marques ? #2
Suite du post publié ici le 1 Juillet.
Pourquoi des marques puissantes comme Coca Cola ou Gap ont-elles du se résigner à accepter les oukases de leurs clients (et pas seulement de leurs clients …) quand Starbucks changeait tranquillement d’identité visuelle sans plus de soubresauts que les récriminations épidermiques de quelques geeks ?
Récriminations rapidement relayées sur Twitter, certes … mais comme bien souvent, ce sont les mêmes qui s’agitent : en France, bien que reprises dès le lendemain par les médias nationaux en ligne, ces dernières sombreront rapidement dans l’indifférence générale et les seuls blogueurs à relayer ensuite l’affaire ne seront que de jeunes professionnels du marketing en mal de reconnaissance – voir Les Médias sociaux sans bla bla.
Pourtant si elle néglige si rapidement ces plaintes, Starbucks n’apparaît pas pour autant comme une marque distante, voire méprisante de l’avis de ses clients : bien au contraire, elle a développé un site communautaire, My Starbucks Idea, pour recueillir idées et critiques … dont elle tient compte !
Et même si seulement une infime partie 130 000 suggestions publiées se concrétise en produits ou services (200 à ce jour), un perpétuel dialogue s’est instauré entre Starbucks et ses clients ; en d’autres termes, la société a appris à partager avec ceux qui la font vivre – ou plutôt à vivre avec eux !
D’aucun diront que le retour, et qui plus est pour une période limitée, du « Chocolate Cinnamon Bread », ne constitue certainement pas une innovation remarquable … mais le véritable objectif de l’opération se situe ailleurs : entretenir une réelle discussion avec la communauté de la marque et surtout, la faire participer à l’élaboration d’une offre en continuelle évolution.
Résumons : Coca Cola, Gap, Starbucks, chacune à leur niveau, bénéficient d’un fort attachement de leurs clients … d’où leur empressement à réagir pour dénoncer une modification de recette ou un changement de logo : on ne s’implique pas dans la vie d’une marque pour laquelle l’ont ne ressent rien.
La différence, c’est que Starbucks a appris au fil des ans à partager avec les consommateurs, la gestion de ses enseignes, la mise en place de ses produits et services, la vie de sa marque.
Et en tire de très concrets avantages : quand en 2009 la compagnie est la cible d’une campagne dénonçant les mauvaises conditions de travail dans ses points de vente (avec la création d’un site Stop Starbucks et la mise en ligne pétition à l’encontre de son président), ses aficionados volent aussitôt à son secours !
Si Starbucks s’en sort mieux que Coca Cola ou Gap, c’est parce qu’elle a renoncé à la propriété absolue sur sa marque – mais évidemment pas à tous les droits : d’ailleurs, c’est bien elle qui fixe la stratégie en décidant de supprimer « Coffee » de son logo pour mieux accompagner l’évolution de son positionnement.
Mais elle sait aussi répondre aux attentes de consommateurs qui réclament plus de variétés de thé (543 votes en faveur de cette idée) ou que les connexions WiFi soient gratuites (6720 votes favorables).
Coca Cola aussi écoute ses consommateurs : la firme a sécurisé le lancement de son New Coke en sondant près de 200 000 consommateurs … ce qui n’a pas empêché son échec !
Mais il y a une sacrée différence entre écoute et dialogue : dans un cas, on pose des questions, on analyse les réponses, on en tire des conclusions – puis on décide, seul, comme un monarque tout puissant ; dans le second, on accepte qu’autrui soit force de proposition, qu’il puisse s’immiscer dans les rouages bien huilés de l’entreprise – voire y déposer le grain de sable qui risque de la stopper !
Le grain de sable … ou la perle rare : mais ne rêvons pas, c’est très rare, le plus souvent ce ne seront que d’insignifiantes améliorations qui malgré tout contribueront énormément à la satisfaction de clients qui gagnent le sentiment de posséder une part des produits, des services, de la marque qu’ils consomment – et qu’ils seront prêts à défendre, comme un de leurs biens personnels.
Si la marque ne leur offre rien – ou plutôt, si l’entreprise ne leur offre pas une part de la marque –, alors ils auront envie de se servir … ne serait-ce que parce qu’ils considèrent que sans eux, sans leurs multiples et réguliers achats, cette dernière n’existerait pas : ils reprennent juste leur dû.
Renoncement volontaire ou non, les marques n’appartiennent plus totalement aux entreprises qui les gèrent (croient les gérer) : partage conflictuel ou consensuel, le résultat sera (plus ou moins rapidement) le même.
Reste le cas des entreprises défaillantes où il n’y a plus vraiment personne avec qui partager … et sur lesquelles nous nous pencherons lundi prochain.
@ suivre …
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