11/03/2012
Imagin'Nation.Com - l'innovation à l'ère des réseaux sociaux
Brice Auckenthaler vient de publier Imagin'Nation.Com - l'Innovation a l'Ere des Reseaux Sociaux : l’occasion de poser quelques questions à un auteur et un ami.
MarketingIsDead : Encore un livre sur l’innovation, pourrait-on dire : en quoi les réseaux sociaux changent-ils notre approche de l’innovation ? Simple adaptation ou changement du tout au tout ? Amélioration ou révolution ?
Brice Auckenthaler : Les réseaux sociaux font tout simplement entrer la force créative à l'intérieur de la boîte qu'est l'entreprise.
Le « think outside of the box » s'en trouve littéralement matérialisé. En s'invitant dans la remise en question de l'entreprise, les forces collectives extérieures incitent ainsi les collaborateurs à l'intérieur à faire mieux.
Ce n'est pas une révolution, juste un pas supplémentaire vers l'ouverture des boîtes mentales que sont les entreprises vers l'extérieur.
Cela va accélérer la mutation vers des marques ego-centric (mon métier, ma vie, mon œuvre, mon cash …) qui vont être incitées ainsi à devenir user generated centric, pour le bien de leurs clients et de leurs partenaires.
A titre d'exemple, la campagne « Unhate » de Benetton a été un des 5 sujets tendance mondial, tant sur Twitter que Google. Les réseaux sociaux s'en sont emparés, démultipliant le nombre de fans de la marque et renforcant la relation one-to-one de l'entreprise avec les citoyens du monde.
Parmi leurs suggestions pour permettre de relayer et matérialiser la campagne, l'idée de créer une Fondation Unhate a germé.
Grâce aux réseaux sociaux, le projet va poursuivre sa vie sans l'entreprise. En interne [''inside the box''], l'action a dopé la motivation des collaborateurs. Ils ont été contactés dans l'ensemble des filiales de la marque dans tous les pays pour connaître leur opinion sur cette initiative.
L'extérieur de la boite stimule l'intérieur. Voilà le vrai pas en avant dans lequel les réseaux sociaux nous entraînent, petit à petit. Bienvenue à la Génération Ikéa où ce sont les fans qui font le boulot
MarketingIsDead : Pour toi, l’innovation de rupture est celle qui « s’inscrit le plus dans le 21ème siècle » : qu’est-ce qui la différencie des autres formes d’innovation, et pourquoi cette affirmation très tranchée ?
Brice Auckenthaler : L'innovation n'est pas une fin en soi. La preuve c'est qu'une innovation dite de rupture se constate a posteriori. Inciter au début d'une démarche d'innovation des équipes à partir en quête du Graal de l'innovation de rupture est contre-productif, paralysant.
La façon dont Tilt ideas pilote au quotidien les processus d'innovation vise à identifier assez rapidement, avec des consommateurs et des collaborateurs les règles du marché. Dans l'esprit de tout le monde résident en effet des habitudes, des préjugés, de soi-disant règles qu'il faut alors 1/ identifier, 2/ définir, 3/ classer en règles obsolètes ou à respecter. Les débats qui s'en suivent posent des bases de thématiques d'innovation
Dans l'optique par exemple, les magasins sont des murs de lunettes; pourquoi ne pas changer cette donne pour mieux se différencier ?
Avant Dyson, tous les fabricants d'aspirateurs pensaient qu'il fallait impérativement un sac; avant Carte Noire, le noir était une couleur bannie dans l'alimentaire...
Cette approche, que Tilt ideas a matérialisé dans une de ses méthodes [DrDr : Dérégler Des Règles], participe non seulement à identifier de vraies innovations à valeur justifiée, mais s'inscrit en réponse au problème clé que rencontrent les marques aujourd'hui : comment remotiver des consommateurs méfiants à l'égard des marques, blasés et gavés d'offres indifférenciées …
MarketingIsDead : Tu cites Steve Jobs en dernière page de couverture : mais le modèle d’Apple est loin du marketing collaboratif, c’est même l’opposée. Alors, la véritable innovation de rupture, c’est des patrons visionnaires … ou des discussions avec les foules ?
Brice Auckenthaler : Pas opposé, bien au contraire.
Une démarche d'innovation a impérativement besoin, en amont, du cadre que sont la vision et le combat de l'entreprise
Sans sa vision (« l'alimentation est notre premier médicament »), Danone n'aurait jamais lancé Actimel, Activia, Danacol, ni racheté le laboratoire Numicol, ni vendu Kronenbourg (la bière c'est moyen pour la santé …), ni créé l'Institut Danone, ni conçu avec la Grameen bank le yaourt Shoktidoÿ supplémenté en calcium pour enfants dénutris...
Le hungry incite à ne jamais tomber dans la myopie du marketing, à veiller constamment, à remettre en question l'existant, à adopter la posture du challenger (même si la marque est leader elle-même)...
Le foolish, quant à lui, incite à identifier des idées tellement stupides qu'elles vont générer un cash monumental et accentuer la différence d'une marque
Sans foolishness, pas de Baby Rollers pour Evian (marque très inspirée by the way par Apple); sans foolishness, pas de Championnat de France des Râleurs [que nous avons contribué à inventer pour la Maaf sous le nom de code « des Baaffes à la Maaf », incitant consommateurs à se plaindre, mais surtout à contribuer à trouver la solution à leur plainte eux-mêmes...); sans foolishness, pas d'espaces immobiliers pour la BNPP, lui permettant en amont de la chaîne de valeur; sans foolishness, pas de parfum JP Gaultier en boite de conserve (il est encore aujourd'hui dans le Top 5 des parfums les plus vendus au monde).
Sans foolishness, pas de DS ou Wii chez Nintendo, ciblant des consommateurs totalement hermétiques aux jeux vidéos. Sans foolishness, pas de Post-it chez 3M, désormais fabricant d'un truc à colle essentiel qui se décolle … et représente 30% des revenus net de l'entreprise.
Sans son patron visionnaire, acceptant d'ouvrir Apple à la force créative des inventeurs d'applications via Appstore, Apple serait (peut être) morte une 2ème fois.
Grâce à son antienne stay hungry stay foolish, Steve Jobs a essaimé une foule de fans apôtres qui incarnent la marque et colportent ses initiatives autour d'eux en autant de conversations.
Avec l'Imagin'Nation, c'est non seulement une 2ème force créatrice qui naît, mais une 2ème force de vente !
La question qui reste : les marques seront-elles piloter en mode cruise-control ces foules lors de ces processus de crowdstorming (néologisme que Tilt ideas a inventé) où il faut à la fois laisser la bride sur le cou des créatifs et maîtriser a minima pour éviter le souk épuisant …
A suivre !
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