09/04/2012
Marketing Brand Values Index
Il y a quelques jours, lors d’une réunion exceptionnelle du Club CommunicationS & Marketing de l’Adetem, Thierry Wellhoff, Président de Wellcom, présentait la première édition du Marketing Brand Values Index, étude réalisée en partenariat avec l’Adetem, l’Uda, l’Escp Europe et La Revue des Marques : voir ici.
Etude réalisée sous la conduite d’un Comité d’Experts – qui se trouvent être de vieux amis (je précise que je ne suis pour rien dans la constitution du dit comité) : Marie-Claude Sicard, auteur de nombreux ouvrages sur la marque et professeur au Celsa, Jean Watin-Augouard, rédacteur en chef de la Revue des Marques, Benoit Heilbrunn, Professeur au département Marketing d’ESCP Europe, Thierry Wellhoff … et moi-même
Que dire de ce Marketing Brand Values Index, sans paraphraser ?
Ce qui me frappe le plus à sa lecture, c’est la banalité des valeurs souvent revendiquées par les professionnels du marketing : la première à l’être par 27% des répondants est la qualité… comme si l’on pouvait imaginer qu’une entreprise puisse aujourd’hui prétendre commercialiser des produits de mauvaise qualité !
Dans l’alimentaire, la qualité devance le goût et la tradition : ne nous étonnons pas de déambuler dans nos hypermarchés devant des linéaires sans fin de produits plus authentiques les uns que les autres. Comment distinguer un fromage, un yaourt, un paquet de spaghettis d’un autre – prix égal s’entend : même label AOC, même moulage à la louche, même recette de grand maman, etc. ?
Plus une marque incarnera qualité et tradition, plus ses produits coûteront chers : quel fatalisme pour un consommateur au pouvoir d’achat en berne ! L’innovation arrive en 7ème position et la différenciation n’apparaît même pas : s’il souhaite découvrir de nouvelles saveurs, mieux lui vaudra se tourner vers des marques exotiques… c’est-à-dire finalement vers une autre forme d’authenticité !
L’innovation montre très logiquement le bout de son nez là où on l’attend le plus : dans le secteur des nouvelles technologies. Là où d’ailleurs les consommateurs se déclarent souvent saturés : à peine ont-ils investi dans un superbe smartphone, un téléviseur dernier cri, une somptueuse tablette (dont ils ne discernent pas encore nécessairement l’utilité) que les voilà aussitôt obsolètes, dépassés par un écran 3D ou un terminal plus puissant…
C’est d’autant plus étrange que peu de constructeurs, parmi ceux qui revendiquent l’innovation technologique, ne la maîtrisent réellement. Prenez le secteur de l’audio vidéo : depuis bien longtemps, les marques majeures travaillent pour partie sous licence de leurs concurrents directs, parce qu’aucune d’entre elles ne dispose de l’intégralité des brevets nécessaires à la mise sur le marché de produits performants ; en d’autres termes, l’innovation technologique se révèle plus une valeur partagée (très concrètement) qu’un réel vecteur de différenciation.
Inutile de passer tous les secteurs en revue : tout le monde se réclame massivement des valeurs élémentaires de son activité, et c’est logique puisque pour les marketers, les valeurs d’une marque, c’est un peu son ADN.
Son ADN ? Pour eux, les valeurs apparaissent étrangement figées, puisque l’ADN, c’est justement ce qui fait qu’un individu demeure le même, de sa naissance à son dernier jour : en ancrant leurs marques dans la qualité, la tradition, les marketers de l’alimentaire reconnaissent de facto qu’elles sont mortelles – puisque leur ADN les empêche d’évoluer, de s’adapter aux nouveaux désirs, aux nouvelles attentes des consommateurs.
Des consommateurs qui, eux, évoluent, changent sans cesse, et de plus en plus vite.
A la fin des années 90, tous les fabricants de baladeurs mp3 se battaient à coups d’avancées technologiques, mettant en avant des caractéristiques qu’aucun client potentiel ne comprenait vraiment, lorsque qu’en 2011, Apple lança un appareil qui n’était ni le plus puissant, ni le plus performant du marché… mais dont l’ergonomie le rendait unique : pour la première fois dans l’histoire du High Tech, une marque issue de l’informatique battait celles issues du monde audiovisuel sur leur propre terrain (n’oublions pas, notamment, que la licence mp3 appartenait à Thomson).
On pourrait également évoquer Dacia, une marque dont ses propriétaires n’attendaient pas un si grand succès en France et en Europe de l’Ouest : certainement ses valeurs ne correspondaient-elles pas à celles du secteur automobile dans ses pays… d’où un succès inespéré.
Pour conclure, le principal enseignement – pour moi – de cette étude, se situe là : une marque – pour réussir, surtout en ces périodes difficiles – ne doit pas se reposer sur les valeurs de son domaine d’activité ; bien au contraire, elle doit être capable de les bouleverser pour mieux les rénover.
Les valeurs d’une marque ne constituent un réel capital que si on s’emploie à l’enrichir constamment… sans se contenter de se reposer dessus.
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