09/11/2009
Diversité culturelle et ethnique
Que sait-on vraiment de la diversité culturelle et ethnique ? Quelles données peut-on utiliser ? Comment aborder ces cibles ? Dans quel cadre juridique ?
Telles étaient - entre autres - les questions auxquelles devaient répondre mes invités lors de la seconde conférence plénière, lors du Semo, mercredi dernier.
Les questions juridiques se sont assez rapidement évacuées : Charles Morel, avocat de notre table ronde précisa qu'il est possible, sous certaines précautions, de recueillir la nationalité ou les convictions religieuses des répondants ; et Abbas Bendali nous en apporta la preuve, avec une étude de type Média Marché réalisée auprès de populations issues de l'immigration extra-européenne.
Mais la suite de la discussion, avec Yves Krief d'abord, puis Jean-Michel Raicovitch, montra que la problématique - essentiellement franco française - se révèle complexe à aborder ... ne serait-ce souvent que faute d'interlocuteurs.
Car aucun des annonceurs sollicités n'accepta de participer au débat ... pas plus que l'INED, qui vient pourtant d'achever "une étude sur "la construction des identités" après deux ans d'enquête auprès de 10 000 personnes, comprenant des Français de naissance, des immigrés et des enfants d'immigrés", comme le rappelle Le Monde.
Dans la plupart des pays, et notamment aux États Unis, la problématique ne se pose pas dans les mêmes termes : les instituts ne se gênent pas de poser les questions adéquates ... et répondent ceux qui le souhaitent. Rien ne prouve que les non répondants diffèrent beaucoup des autres enquêtes - on oublie d'ailleurs très vite en France que les non répondants absolus représentent plus de 80% de la population, mais c'est un autre débat.
Le malaise est certainement ancien - quelque part tirant ses racines du "fichier juif" de la seconde guerre mondiale, et de tous ces fichiers aux relents racistes que l'on a retrouvé ensuite, bien des années après, enkystés au cœur même de la police nationale.
Pourtant, d'un point vue strictement rationnel, quel danger représente une étude ciblant les noirs pour mieux adopter une offre cosmétique ou les musulmans, pour évaluer le marché des produits halal.
D'un autre côté, je ressens toujours une profonde réticence en moi, dès que l'on aborde la libéralisation de ce type d'études - qui d'ailleurs, comme je le disais plus haut, sont possibles à mettre aujourd'hui en œuvre - et je ne crois pas que la présence de Hortefeux ou Besson au gouvernement y soit étrangère : on ne sais jamais trop où cela peut nous entrainer quand ony met le petit doigt.
D'où ce récurrent malaise : angoisses, fantasmes, réticences ... et finalement censure.
En arrivant sur le plateau, je pensais naïvement que face à un tel problème éthique, un peu d'autorégulation devrait suffire à compenser une carence législative ; en le quittant, je me disais que le problème est plus profondément enraciné que je ne le croyais, qu'il nécessiterait peut-être quelque-chose de l'ordre de la psychothérapie collective ... et que j'étais pas sûr moi-même de vouloir secouer un peu plus en avant le sujet.
Bref, nous avons à peine abordé le sujet, entrouvert la boite de Pandore ... et l'avons vite refermée, face à une assistance très ... renfermée : jamais le dialogue ne s'est vraiment engagé avec la salle, preuve - s'il en faut encore une - d'un malaise collectif.
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Commentaires
Bonjour,
première visite sur votre blog et je salue votre initiative de comprendre le fond du problème en France. Pourquoi est-il si tabou de collecter des informations sur les comportements culturels de certaines catégories de la population, j'entends bien évidement, les Noirs, les Arabes ou encore mêmes les Juifs (oui, pourquoi parler si souvent du marché Hallal sans jamais évoquer le marché du Casher????).
Il me semble que le tabou pourra être levé quand, enfin, les entreprises auront compris que ces populations sont des consommateurs, ayant un pouvoir d'achat et qu'ils representent des marchés non négligeable jamais encore abordés.
Pour tout vous dire, je trouve la position des entreprises françaises vexantes, car sous couvert de ne vouloir ouvrir la boite de Pandore, on en finit par mépriser une partie de ses consommateurs : ils n'existent pas, on ne leur parle pas!
Écrit par : Bellebene | 16/11/2009
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