L’art du sondage stupide
05/02/2013
A la une du Journal du Net JDN Management, cette question « Actuellement, l'allocation chômage peut atteindre plus de 6 000 euros par mois. Selon vous, faut-il abaisser ce plafond pour faire des économies ? ».
Réponse : Oui à 100% pour … 3 votes !
Allez, les noms et les adresses de ces aigris !
Mais indépendamment de la stupidité de laisser en ligne un tel résultat (puisque maintenant, la question est : « Faut-il réserver une partie du congé parental au père ? »), on peut légitimement se demander où réside l’intérêt d’un tel sondage.
Pour animer le journal ? Mauvaise pioche : il n’y a eu que trois mauvais coucheurs pour vouloir sucrer les indemnités des chômeurs très bien indemnisés.
Parce que l’on espérait une meilleure base de répondants … et que l’on juge sérieux de poser une telle question ?
Tout d’abord, un tel choix ne se pose jamais comme tel : les gouvernants doivent choisir entre différentes mesures … donc un bon questionnement serait de proposer toutes les options possibles de réduction du déficit de l’assurance chômage – et pas juste la solution unique.
Ensuite, il faudrait un peu éclairer le contexte : quelles seraient les sommes économisées ? Et quelle serait la contrepartie de cette réduction ? Car il est évident que si l’on limite les indemnités, on va peut-être aussi (c’est une option) limiter les cotisations.
Surtout, une telle question est nécessairement segmentante : quelques tris complémentaires – non prévus évidemment – devraient apporter un peu d’éclairage.
L’âge par exemple : se poserait la question des chômeurs de plus de 50 ans qui ne retrouveront jamais de travail ; facile de penser pour eux quand on est jeune cadre prometteur !
La position individuelle face l’indemnité potentielle : plus facile de dire « oui » quand soi-même on ne risque jamais d’atteindre un tel montant.
Une question hors de tout contexte ne signifie rien – et sa réponse encore moins ! Mais nul doute qu’il se trouvera un zozo pour un jour s’indigner des trop fortes allocations de certains chômeurs et évoquer le résultat ci-dessus mentionné … oubliant bien sûr de préciser comment il a été obtenu et la base des répondants !
La « questionite » démange les blogueurs et les médias en ligne : à lire ce genre de stupidités, on ne peut que se poser la question du sérieux des titres qui les publient … et de la pertinence des autres contenus qui s’y lisent : avant les journalistes recoupaient les informations avant de les porter à la connaissance de leurs lecteurs ; aujourd’hui dans certains magazines, c’est au lecteur de le faire.
Finalement, le principal intérêt de ces sondages bidons (qui décrédibilisent tant la presse que les spécialistes des études, par rebond, hélas), c’est de pointer des contenus journalistiques qui ont de fortes chances de se révéler tout aussi bidons !
1 commentaire
Je viens de découvrir aujourd'hui même votre blog avec bonheur.
Au plaisir de lire la suite de vos publications.
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