Les boules de cristal ne suffisent plus
05/04/2013
Qui aurait prédit à la fin des années 90 – ça fait plus proche qu’au millénaire dernier, même si cela revient au même – qu’une Start up connue des seules geeks et autres universitaires allait bientôt dominer non seulement le marché des moteurs de recherche, mais également celui de la publicité mondiale ?
Qui aurait prévu – disons en 2005, quand Murdoch rachetait MySpace pour la bagatelle de 580 millions de dollars – que le bras de fer pour la domination du Web l’opposerait aujourd’hui à un réseau social dont personne ne parlait alors – aujourd’hui que MySpace a, quant à lui, perdu plus de 90% de se valeur ?
On peut toujours se tourner vers les consommateurs … Mais rappelons qu’à la fin des années 80, diverses études menées par les opérateurs de l’époque, soulignaient le désintérêt quasi-total du grand public pour des réseaux de téléphonie mobile. On peut également se pencher sur les évolutions technologiques … mais quand les chercheurs de Fraunhofer travaillaient activement à la compression musicale dans les années 90 pour aboutir à ce que l’on nomme aujourd’hui le mp3, et que les géants de l’audiovisuel réfléchissaient aux premiers baladeurs numériques, nul n’aurait imaginé que les jeunes d’aujourd’hui privilégieraient l’écoute en ligne pour le plus grand bonheur de YouTube et autres Deezer !
Face à de telles évolutions, la place du marketer apparaît bien inconfortable : c’est à lui que revient la lourde tâche d’éclairer l’entreprise sur ce que seront ses marchés de demain ! Mission impossible ? D’ailleurs, nombre de Start up d’hier (parmi celles qui ont réussi, car les cimetières sont pleins de jeunes pousses prématurément décédées) se vantent de n’avoir pas accordé la moindre place au marketing – du moins à leurs débuts. Microsoft, Google les premières … même si aujourd’hui le marketing occupe une place prépondérante dans leur structure : péché de maturité ?
En fait le marketing a fortement contribué au succès de MS DOS – et donc de Microsoft – même si alors, il se situait chez … IBM, qui avait parfaitement compris la nécessité, pour répondre aux attentes des responsables informatiques, d’un système d’exploitation universel, compatible avec toutes les marques … et donc hors IBM, pour la plus grande fortune de Bill Gates.
Certes, Google apparaît bien comme le pur produit de la recherche … universitaire, puisque le système de recommandation à la base de son fameux PageRank, s’inscrit dans la droite ligne de l’autorité scientifique où le meilleur crédit est toujours accordé au chercheur le plus cité par ses pairs. Et pour son développement, la firme de Mountain View s’est appuyée sur le premier réseau social existant sur le Web : celui des chercheurs universitaires qui, découvrant là un mode d’évaluation très proche de celui auquel ils étaient habitués, ont radicalement contribué à son succès. Aujourd’hui, on parlerait de stratégie virale.
Le marketing, un département « animateur »
Interrogé lors de la Nuit du Marketing de l’Adetem, Olivier Aizac, créateur du site leboncoin.fr, expliquait que le marketing n’avait pas joué un grand rôle au démarrage de sa société : tous préféraient privilégier les actions de terrain directement opérationnelles. Par exemple, aider leurs clients à rédiger correctement leurs annonces : textes clairs, photos attrayantes, etc. Bref, leur enseigner le b.a.ba d’un métier … dont ils n’avaient évidemment pas conscience ! Ecouter ses clients, les guider : aujourd’hui, on parlerait de relation clients.
Il serait stupide de demander aux marketers de résoudre des challenges aussi inatteignables que de prédire le futur – ce qui ne signifie pas qu’il n’entre pas dans leurs attributions de réfléchir à ce que pourrait être ce futur ; mais dégager des scénarios prospectifs ne relève heureusement pas de la boule de cristal. Mais il serait tout aussi stupide de croire en l’inutilité absolue du marketing, juste parce quelques Start up ont fait l’impasse dessus – ou plutôt déclarent s’en être passé. En fait, leur succès, bien souvent ces dernières le doivent à la démarche – inconsciemment ? – marketing de leurs fondateurs qui exploitaient des stratégies de développement, de communication, de relations clients innovantes … mais bien réelles.
La clef du succès du marketing ne réside pas dans la structure (combien de collaborateurs au sein de l’équipe marketing) mais dans la culture d’entreprise : combien de collaborateurs hors de l’équipe marketing ont le sens du client ? Le département marketing d’une entreprise ne saurait être un département comme un autre – un simple département prestataire de services. C’est avant tout un département animateur, organisateur, pour dynamiser une entreprise où l’intégralité des collaborateurs seraient « marketing minded » (comme on disait hier, en bon franglais) ou simplement tournées vers le client, le consommateur, le citoyen.
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