Une crise peut en cacher une autre ...
04/03/2009
Tout le monde a les yeux tournés vers les bourses, qui dévissent, les banques, qui creusent les pertes, les états, qui cumulent les plans de relance ... tandis que les experts jouent à se faire peur, comme Klaus Schmidt-Hebbel, économiste en chef de l’OCDE, déclarant récemment à Libération : "Le pire des scénarios est en train de se matérialiser".
Et tout ça, quel effet cela va-t-il avoir sur le consommateur ?
Car finalement, jusqu'à ces derniers mois, la consommation se portait plutôt bien en France, avec des dépenses des ménages progressant bon an, mal an, d'environ 2,5% par an, en volume, de 2000 à 2007, selon l'Insee.
Les ménages semblaient même plutôt s'en sortir, avec une hausse moyenne des prix à la consommation entre 1,2% et 2,4%, excepté un pic à 3,6% à la mi 2008, mais sans lendemain, semble-t-il.
Les ménages ? Tous les ménages ? Certainement pas, et c'est là que le bâts blesse.
Les revenus déténus par les 10% de foyers les plus riches (en bon jargon statistique, l'Insee parle de "masse des niveaux de vie") sont passés de 22,6% à 24,5% de la totalité des revenus disponibles en France de 2002 à 2006, et la part des 3 déciles les plus pauvres, de 16,2% à 15,3%.
Ou pour lire les chiffres d'une autre manière, les revenus à disposition des 10% de foyers les plus riches représentaient 5,7 fois ceux des 10% les plus pauvres en 2002 ... et 6,8 en 2006.
Bref, les écarts se creusent, et très certainement, la consommation n'a-t-elle pas pareillement progressé pour tout le monde !
Pour les 20% de Français les plus pauvres (les deux premiers déciles de l'Insee), le poste "Logement, eau, électricité, et combustibles" représentait en 2001, 22,2% de leurs dépenses totale : en 2006, il grimpe à 24,8% ! Certainement pas parce ces derniers se sont plus confortablement installés : non, simplement les loyers ont flambé.
Dès lors, moins d'argent pour le poste "Produits alimentaires et boissons non alcoolisées", qui chute de 20,3% à 17,7% sur la même période : il faut bien rogner quelque part pour boucler les fins de mois.
Le poste "Transports", quant à lui, est passé de 11,7% à 11,1% : un bonne secousse là-dessus, et c'est l'automobile qui craque aujourd'hui !
Pourtant, les prix de l'alimentation sont certainement ceux qui ont le plus flambé ces dernières années, jusqu'à +6% en 2001 (passage à l'euro) et 2008. L'indice des prix des produits manufacturés tournent depuis plusieurs années autour de +2,4% par an, celui des services flirte avec le zéro.
Bref, avec des revenus en constante baisse, un bon quart de la population française doit aujourd'hui faire face à des hausse brutales de prix ... et procéder à des redoutables arbitrages budgétaires, arbitrages qui les conduisent à se restreindre même sur le nécessaire (l'alimentation).
Des Français qui ne peuvent plus se payer les marques haut de gamme, ni même le moyen de gamme ... bientôt même plus les marques distributeurs ou les marques premier prix : ces gens-là, comment les entreprises - et le marketing - vont-elles pouvoir en tenir compte ?
2 commentaires
Bon billet que j'ai inclus dans ma revue de blogs en lien.
Je fais largement circuler ce billet et le précédent
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