L'éthique s'invite au Sémo
03/11/2008
Pour une grande majorité de professionnels, l'éthique demeure souvent un concept extrêmement abstrait - certes très respectable et respecté, mais sans réalité, sans vécu.
L'éthique évoque des guides de bonnes pratiques, des codes de déontologie ... des règles que l'on respecte tacitement parce que l'on est membres d'associations professionnelles. Ou simplement parce qu'il nous paraît juste de vivre et pratiquer ainsi.
L'éthique s'impose un peu plus à nous quand nous devons constater de graves manquements à son égard : ces dernières années, je n'en ai personnellement constaté que deux de vraiment inquiétants ... ce qui fait beaucoup, car ce n'est que ma petite expérience de consultant indépendant.
La première m'a tellement indignée que j'ai lancé mon blog pour la dénoncé : un recruteur de groupes qualitatifs qui claironnait lors de son passage à la télévision qu'il fournissait les meilleures prestations du marché ... et qui en fait bidonnait comme un malade !
La seconde est plus récente - en faite je viens de lever le lièvre : une société de marketing direct qui réalise de faux sondages en ligne pour mieux piéger le chaland ! "Donnez votre avis sur les produits que vous consommez ... et recevez nos offres commerciales". Indigne ! Affaire à suivre.
Mais il y a les petits manques, quotidiens : minimes, mais nombreux. Si peu graves, que bien des professionnels "font avec" ... jusqu'au jour où ils prennent également leurs aises, comme les autres.
Bien sûr, tout cela ternit l'image de toute la profession et nuit doublement aux professionnels qui ne trichent pas : ils pâtissent comme les autres de la dégradation d'image du secteur d'activité ... et en plus, ils subissent une concurrence déloyale puisqu'ils ne trichent pas - et cela a un coût.
Il y a, par exemple, cette pratique de certains recruteurs (certainement une infime minorité) qui s'arrangent un peu avec les quotas, ou acceptent un consommateur qu'ils ont déjà accepté peu auparavant.
Ces enquêteurs qui complètent le questionnaire d'un interviewé qui les a lâchés dans la rue ; ou qui vieillissent ou rajeunissent très légèrement les enquêtés à la limite d'une classe d'âge.
Il y a les annonceurs qui exigent des terrains dans des délais intenables et qui poussent leurs fournisseurs à la faute ; ou des résultats un peu plus conformes à leurs attentes, pour plus facilement les présenter à leur hiérarchie - pas grand chose, mais enfin ...
Et puis les instituts qui acceptent ces contraintes - et ferment les yeux pour ne pas perdre le client.
Aujourd'hui, de plus en plus, il y a également ces consommateurs qui s'échangent des bonnes combines et des adresses par Internet et participent à des réunions de groupes qui ne les concernent pas, juste pour récupérer leurs 50 euros au passage. Voire mentent effrontément si nécessaire.
Souvent éthique et qualité se recoupent ... mais pas nécessairement.
Recruter des consommateurs en leur faisant immédiatement miroiter une forte prime ne contredit pas vraiment l'éthique : rien de vraiment malhonnête en soi ... mais certainement de forts risques quant à la qualité des résultats.
Exiger le vendredi soir d'un chargé des tris complémentaires pour une présentation qui a lieu le lundi matin ne signifie pas que ce dernier présentera un tas de boue ... mais la démarche ne me semble pas très éthique.
Tout cela pour dire qu'il ne faut pas tout confondre et ne se soucier d'éthique que lorsque la qualité est en jeu : l'éthique constitue une valeur et un sujet de vigilance en soi.
La question de l'éthique ne s'inscrit pas dans l'actualité : elle est de tous temps.
Certes les tensions actuelles sur les délais - pour les respecter, il faut parfois prendre des libertés, mais après tout, les commanditaires s'en doutent bien un peu - et les coûts - avec un recrutement de qualité, le devis ne passe pas, c'est le problème des acheteurs - conduisent bien des professionnels à donner de plus en plus fréquents coups de griffe à la déontologie.
Mais ce qui change aujourd'hui, et qui fait que nous en parlions cette année au Sémo, c'est que jusqu'à présent, le problème de l'éthique était essentiellement un problème de professionnels, qui se passait et se réglait entre professionnels - éventuellement dans le dos et sur le dos des consommateurs ; mais ces derniers n'avaient pas vraiment le droit au chapitre.
Aujourd'hui, les consommateurs peuvent également développer des comportements non éthiques - en camouflant leur participation à une précédente réunion de groupe, en s'échangeant des adresse, etc. Mais ce n'est pas le plus grave.
Ils peuvent également découvrir que certaines brebis galeuses - minoritaires certes, mais se réclamant du marketing - développent des comportements non éthiques à leur égard.
Ce qui suffit alors à jeter l'opprobre sur toute une profession et faire du terme marketing un terme péjoratif !
Ceci constitue mon introduction à la première Conférence Plénière du Sémo - voir mon post du 30 Octobre.
Si vous avez des questions à poser à mes interlocuteurs, il vous suffit de poster un commentaire ici même.
1 commentaire
Bonsoir Monsieur,
j'ai trois questions liées à votre sujet:
1) Quelles sont les moyens de réduire les mauvaises pratiques ?
2) Y a t-il un régime de punition suffisamment désincitatif ? Quelles types de sanctions existent ? Sont-elles appliquées ?
3) Est-ce éthique de publier les sondages nus dans la presse, c'est-à-dire, avec peu d'informations, ou disons une information réduite. Pourquoi ne pas mettre en ligne les sondages complets, et dans les publications presse insérer l'adresse où se trouve le sondage complet pour que les lecteurs intéressés puissent avoir accès à l'intégralité des informations ?
Merci. Votre introduction est très bonne, et l'idée de laisser à vos lecteurs la possibilité de poser des questions l'est aussi.
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