Retour du Japon : téléphonite aiguë ?
28/08/2008
La vision que les médias européens – et tous les "spécialistes" au sens large – nous livrent du Japon est celle d'une population le mobile en permanence vissé à l'oreille : rien à voir avec la France, toujours en retard d'une révolution technologique.
Moi qui ai du mal à supporter tous ces parisiens dont le téléphone sonne sans cesse dans le métro ou le train et qui crient plus qu'ils ne parlent – qui imaginent qu'en élevant la voix ils entendront certainement mieux leur correspondant ; ces cyclistes qui racontent leur vie à d'invisibles amis sans se soucier des passants stupides qui traversent dans les clous ; de ces pétions qui vous bousculent, etc. Je craignais donc le pire !
Je m'imaginais des flopées de cadres envahissant trains de banlieue et Shinkansen, BlackBerry – ou plutôt un équivalent plus efficace, design, moderne – à la main pour traiter leurs affaires en perpétuel "direct" : un peu comme une voiture de TGV Paris Lyon un lundi matin, mais à la puissance 10.
Erreur, fatale erreur : les Japonais me sont apparus à la fois plus discrets et moins fanatiques que les Français. Personne ne téléphone dans un train de banlieue : c'est interdit … et respecté ! Ainsi l'employé d'un hôtel de Tokyo qui cherchait de toute urgence à joindre son directeur, m'avoua-t-il penaud : « Je lui ai laissé un message, il me rappel-lera à son arrivée en ville, c'est totalement interdit de téléphoner dans une rame ».
Dans le métro ou le bus, rares sont ceux qui décrochent quand leur appareil sonne – ou plutôt vibre : même discrétion que dans le train, même si ici aucune interdiction ne les frappe. Ce qui n'empêche pas une part assez importante des passagers de tapoter frénétiquement sur le clavier de leur appareil pour surfer sur la toile – même si la majorité de ceux que j'ai pu observer ne disposaient que de téléphones assez "classiques" dans leur design.
Dans la rue, les Tokyoïtes auront plutôt tendance à s'arrêter et se ranger pour prendre un appel. Par contre, il n’est pas rare non plus de les voir consulter un plan ou leur itinéraire en marchant : plutôt pratique quand on sait que les immeubles japonais sont numérotés au petit bonheur, sans réelle logique – premier construit, premier numéroté, peu importe sa position dans la rue ou le quartier.
Alors quand vous demandez votre chemin à un passant, il n’est pas rare de la voir sortir son téléphone, et vous indiquer la route à prendre … sur son petit écran !
La majorité des Japonais sont plus discrets que nos concitoyens – présentent un comportement moins exhibitionniste. En ce sens, naviguer en silence sur le Web correspond à leur discrétion naturelle que s'égosiller dans un microphone : peut-être doit-on y chercher une des clefs du succès de l'i-Mode et de la 3G …
La majorité : reste malgré tout une part suffisante de passants pour vous cogner, de cyclistes pour vous écraser … Comme cette femme aux allures de Yoko Ono il y a quelques jours près de la gare de Kyoto : mais Yoko Ono, ce n'est pas vraiment le Japon.
Ni la pop music, ni l'art moderne non plus, mais ça, c'est une autre histoire !
Les commentaires sont fermés.