Le Retour sur Investissement des actions marketing : une banale erreur !
20/04/2006
La performance du marketing : de l’efficacité au retour sur investissement, tel sera le thème du prochain Atelier de Recherche Appliquée de l’Association Française du Marketing – et de la table ronde à laquelle je suis convié, avec d’autres annonceurs.
La question de la mesure du Retour sur Investissement des actions marketing en général et publicitaires en particulier apparaît totalement légitime… de prime abord – bien que compliquée et dangereuse – mais en réalité, totalement perverse et inutile !
Une question légitime… de prime abord
Quoi de plus normal pour celui qui investit temps et argent dans une entreprise que de souhaiter évaluer la rentabilité de sa mise de fond : car si le rendement se révèle inférieur à celui de la Caisse d’Epargne, mieux vaut attendre que la fortune vienne en dormant !
Les sciences sociales ont toujours été fascinées par les sciences « dures » où les mathématiques règnent en maîtres : mais si la course des étoiles dans le ciel répond à des lois établies – avec bien des difficultés – par Newton et Einstein, il n’en va pas de même pour le marketing ou la communication publicitaire. C’est pourquoi l’exercice ne peut se révéler que complexe et périlleux.
Complexe, car rien ne permet de valider la pertinence des constructions patiemment élaborées : jamais les prédictions issues de la modélisation ne se sont révélées exactes. En sciences sociales, jamais les mêmes causes ne produisent exactement les mêmes effets.
Périlleux, parce qu’à trop vouloir discerner des effets, on privilégie inéluctablement le court terme, donc la promotion à la publicité, les sorties de rayons à l’image de marque. Les financiers vous le diront toujours : « Arrêtez de communiquer un an ou deux, ça ne change pas grand-chose. Arrêtez les offres promotionnelles, et vous perdez des parts de marché ».
Il y a bien un jour où les promotions ne suffisent plus, au bout de deux à trois ans : mais là, il presque trop tard pour remonter la pente !
Une problématique perverse et inutile !
Imaginons cependant que la modélisation en sciences sociales en général, et en marketing plus précisément, fasse un immense bond en avant et que l’on puisse accéder à des certitudes dignes des sciences physiques – belle utopie ! On saura alors comment doser avec précision tous les moyens marketing pour en maximiser le rendement. Enfin, tous ceux sur lesquels on peut agir, car la concurrence restera toujours libre de ses propres choix !
Ce qui, intellectuellement parlant, ne serait pas si mal… dans une société relativement stable : car si le contexte change, tout tombe par terre, les précieux indices, savamment calculés, deviennent immédiatement caduques.
Je ne vais pas ici répéter ce que l’on trouvera plus argumenté dans d’autres notes de ce blog – ou dans mon dernier livre : mais nous changeons totalement de civilisation et les recettes issues du passé, si on les applique sans discernement, ne peuvent conduire qu’à de cinglants échecs. Or ce que nous proposent les adeptes du Retour sur Investissement, c’est précisément d’investir dans des outils sophistiqués et (donc) chers pour répliquer un passé… non répliquable.
Bref de dépenser beaucoup pour mettre au point des modèles illusoires qui ne serviront qu’à faire des erreurs !
Transformer les entrepreneurs en spéculateurs : voilà ce qu’ils prônent ; et surtout en des spéculateurs sans risques. Objectif totalement inatteignable dans un monde en mutations comme le nôtre : l’avenir appartient aux entreprises créatives – et non aux financiers !
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